Tu as dit (nouvelle)

Alhambra

Tu as dit (nouvelle)

19

03/11/08 à 19:06

Il est midi. Je ne suis toujours pas levé. Mais tu as dit que c’était bon.
Il n’y a pas de problème. Je m’enroule un peu plus dans ma couette, mais je suis nu, et j’ai froid. Tu as dit que tu viendrais me réchauffer.
Mais tu ne peux pas venir. Les autres ne sont pas au courant. Et je veux pas qu’ils le soient.
Dans la chambre à côté, ils font l’amour. Disons « ils baisent ». Ce serait plus exact. Il y a une femme, un homme. Au moins, c’est mixte. « Au moins ils sont normaux », t’avais dit.
Tu crois qu’on est anormaux ? Tu crois que c’est anormal de ressentir du désir l’un pour l’autre alors qu’on a tous les deux ce truc entre les jambes. Maudit truc, d’ailleurs. Si seulement j’avais une paire de sein, tout serait mille fois plus simple. Je t’aimerais, tu m’aimerais. On baiserait. Non, on ferait l’amour.
Il faut que je me lève. Il est 14 heures, je ne peux pas rester comme ça.
Brr Brr. Mon portable qui vibre. Si c’était toi ? ça fait bien 4 jours que tu m’as pas donné de nouvelles. Ce serait drôle que ce soit toi, alors que je pensais justement à ton entre-jambe. Tu me diras, j’y pense plutôt souvent, en ce moment.
ANTOINE P. Bien sûr que c’est toi. Personne d’autre ne m’appelle, de toute façon. Qui a envie d’appeler un mec qui reste dans son lit toute la journée à rêver d’un autre mec.
« Ouais ? » Je prends ma voix « mâle », ma voix d’homme blasé. Tu as dit que tu trouvais ça sexy.
« Maxime, c’est moi.
-Je sais.
-Bah ouais tu sais, mais ça se fait au téléphone, de se présenter.
-Commence pas, okay.
-Je peux venir ?
-Nan. Les autres colocs sont là. Moi, je peux venir ?
-Ouais. »
Je me lève. M’habille sans trop y penser. Tu as dit qu’un jour tu m’enlèverais mes vêtements. Tu as dit tout ça, moi j’ai retenu. Et depuis, j’attends.

Chez toi ça sent l’homme. Ça me donne des envies terribles, depuis le début. Mais j’en parle pas.
« C’est le bordel, ici. »
Tu ne relèves pas. Tu me pousses contre le mur, ton regard est incroyable. Brûlant. J’ai du mal à me dire que c’est moi que tu regardes.
« Maxime putain, arrête d’éviter le sujet. Arrête tes petites phrases. On s’en fout de la pluie et du beau temps, du bordel qu’il y a chez moi.
-Qu’est ce que t’as, tout d’un coup ? »
Tu te colles à moi, contre le mur. Tu sens la cigarette et le café. Tu me fais mal, tu m’étouffes. Et ton souffle qui s’engouffre dans mes lèvres entrouvertes. Et je la sens qui se lève. Ça fait mal. J’ai envie de chialer, comme un gamin. Ton œil noir qui me menace.
« Antoine, qu’est ce que tu as ?
-Envie de toi. »
Tu me déshabilles, mon souffle s’accélère, je ne me ressemble pas, tu ne te ressembles pas. On dirait des bêtes. On fait l’amour, on baise, je ne sais plus comment appeler ça.

« ça va ? »
Tu as un petit sourire vainqueur, comme si tu avais gagné, comme si tu m’avais eu. Je n’aime pas trop ça. Je ne réponds pas.
« Tu restes ici cette nuit ? »
C’est pas juste une invitation. T’es là, à poil, à me demander si je reste dormir chez toi. Ça va trop vite pour moi.
« Je sais pas.
-Faudra t’y faire hein.
-Quoi ?
-T’es comme ça Maxime, ça changera pas. T’y peux rien. »
Ouais, faudra que je m’y fasse. J’ai encore envie de pleurer. Ça va trop vite, bien trop vite pour moi, j’y comprends rien.
« Allez viens. »
Je me colle contre toi. Et on passe la soirée, la nuit, comme ça, corps à corps.

Il est midi. On n’est toujours pas levés. Mais tu as dit que c’était bon. Je peux rester.