Dans le cadre d'un concours de nouvelles auquel j'avais participé, il y a deux ans, j'ai décidé d'écrire un texte sur le thème imposé qui était celui des "files d'attente". C'est un texte assez...décalé que je vous propose, c'est un premier jet, il est encore tout chaud, et j'attends vos commentaires pour améliorer tout cela.
Merci à vous.
"Depuis que je suis tout petit, j'ai développé le goût pour une passion particulière : les files d'attente.
J'ai toujours aimé l'atmosphère des files d'attente, l'empressement des gens, l'agacement parfois. Le fait que tout le monde soit confronté au même problème, qui est l'attente. J'ai eu le temps de grandir et de remarquer au fil de mon enquête que les gens arrivaient difficilement à vivre avec cette attente. Les visages se crispent, les mains commencent à trembler toutes seules, et la panique se met à envahir chaque personne de chaque file. Le jeu était de savoir qui du gros monsieur à lunettes et aux gouttes de sueur dégoulinantes ou de la vieille dame au chapeau, et à la moustache naissante, allait arriver en premier au guichet. Car les files d'attente sont souvent doubles, voire triple, ainsi, je me souviens que tout en prenant soin de ne pas lacher la main de ma maman, je m'amusais à observer ces courses d'escargots impatients. Pendant que tous mes copains jouaient au ballon dehors, quelque soit le temps, j'accompagnais n'importe qui voulait aller à la poste, à la boulangerie, ou chez le charcutier. Ce plaisir est très vite devenu une passion, et j'avais ainsi dressé un planning des listes d'attentes à parcourir. Le lundi, c'était la banque avec Papa, le vendredi avec maman au supermarché. Il m'arrivait parfois de partir d'un endroit quand la file d'attente n'était que peu garnie, ou bien d'attendre posté dans un coin du magasin, en fin guetteur, les probables participants à mon divertissement quotidien.
En grandissant, j'ai compris que cet engouement pour les files d'attente venait d'une recherche de complicité entre les gens et moi. Dans la file, tout le monde est serré, et ce que certains peuvent qualifier d'oppressante, moi, je trouvais cette posture très conviviale. Je prenais plaisir à partager un moment avec mes amis de passage, sachant que la plupart d'entre eux n'apportait pas autant d'attention à ces files que moi ; cela m'était pourtant égal puisque j'y trouvais mon compte. A l'adolescence, cette passion s'est petit à petit transfomée en addiction. Alors que certains de mes camarades de classe étaient dépendant de diverses drogues nocives pour la santé, j'étais moi même addict de ma propre drogue, sans danger, celle qui vous pousse à sécher un cours par simple envie d'attendre vingt minutes au supermarché du coin. Souvent lorsque venait mon tour, je me dérobais, faisant mine de n'être plus satisfait de l'article choisi, ou bien alors j'expliquais au vendeur que je m'étais trompé, et repartais sans rien avoir acheté. L'achat n'était pas une nécessité, l'attente si. J'en avais besoin pour être complétement heureux. Parfois il m'arrivait de me coucher le soir en me rappelant de telle ou telle file d'attente, de telle ou telle personne, et cela me plaisait. Jusqu'à l'âge de vingt ans, j'ai vécu parfaitement avec cette passion, devenue addiction, mais qui ne dérangeait personne.
Cela a commencé à devenir contraignant pour mon entourage lorsque j'ai commencé à m'exclure du monde qui m'était proche. Comme les hommes qui jouent à des jeux en ligne sur l'ordinateur, et qui se créent leur propre monde, mes files d'attente étaient devenues mon monde parallèle. Je refusais de parler à mes amis, et même ma famille, si personne ne voulait m'emmener dans un magasin, assouvir mes envies d'attente. De plus, les vendeurs ont commencé à comprendre mon jeu, et ont remarqué mes venues quotidiennes qui n'avaient pourtant pas l'air de les déranger au premier abord. Cependant, comme je venais souvent et que je n'achetais en général, rien, certaines firmes ont cru que j'étais un espion envoyé pour renseigner les concurents. Ainsi toutes les banques m'ont fermé leur porte, la boulangère baissait les stores quand elle me voyait arriver au loin, et le charcutier me menaçait avec son couteau. Apparement, mon jeu avait dépassé ses limites, et j'en étais devenu prisonnier.
J'ai longtemps réfléchi, plusieurs années, et je me suis remis en question plus d'une fois pour trouver une réponse. J'ai tourné, et retourné le problème dans mon esprit, dans tous les sens possibles. J'ai aussi cru que les gens m'en voulaient d'être tout simplement heureux, et que cela devait être de la pure jalousie. Et puis, finalement, je me suis dit que la meilleure manière de trouver une solution, était de vous en parler. Alors je vous repose cette question pour la dernière fois... Suis-je oui ou non fou, Docteur?"
WW.
Les files d'attente. |
1/13 |
14/02/2011 à 03:08 |
J'ai beaucoup apprécié la construction, tout a fait chronologique et elle se lit bien. La seule chose qui m'a un peu gênée, est que tu répètes 3 fois au début du texte, le mot "attente", et 3 fois "file", même si l'un n'est qu'un homonyme. Cela sonne un peu faux quand on lit, sinon, j'aime beaucoup la touche finale.
Les files d'attente. |
2/13 |
14/02/2011 à 08:10 |
Oh, j'adore ton texte ! Il est simple à lire, ça m'a fait passé le temps, et puis j'ai adoré la façon dont c'est narré. Moi, qui d'habitude, ne supporte pas les textes narrés à la première personne !
Enfin voilà, c'était simplement génial.
Les files d'attente. |
3/13 |
14/02/2011 à 08:18 |
J'ai pris grand plaisir à lire. Un peu de répétition comme dit au dessus, mais il n'y a pas cinquante mots pour designer une file..
Les files d'attente. |
4/13 |
14/02/2011 à 09:57 |
Je comprends que la répétition peut être gênante, mais c'était justement pour marteler l'idée et pour justement souligner le fait que le mec est fou. Il se répète, et on finit par comprendre son idée. Cependant, je suis d'accord avec vous, c'était voulu mais je comprends le fait que cela puisse gêner à l'oreille.
Les files d'attente. |
5/13 |
14/02/2011 à 17:12 |
C'est l'impression de tourner en rond qui me gêne personnellement et peut-être aussi le fait que je trouve que la chute arrive trop rapidement. J'aime bien la façon d'aborder sinon.
Les files d'attente. |
6/13 |
14/02/2011 à 17:23 |
Frosties a écrit :
C'est l'impression de tourner en rond qui me gêne personnellement et peut-être aussi le fait que je trouve que la chute arrive trop rapidement. J'aime bien la façon d'aborder sinon.
Tu aurais préféré un texte plus long? (C'est mon premier jet, il y aura forcément du travail de refait)
Les files d'attente. |
7/13 |
14/02/2011 à 17:29 |
Whatever Works a écrit :
Frosties a écrit :
C'est l'impression de tourner en rond qui me gêne personnellement et peut-être aussi le fait que je trouve que la chute arrive trop rapidement. J'aime bien la façon d'aborder sinon.
Tu aurais préféré un texte plus long? (C'est mon premier jet, il y aura forcément du travail de refait)
Plus développé ouais. *O*
Les files d'attente. |
8/13 |
14/02/2011 à 17:48 |
en tout cas je trouve l'idée super, mais j'y connais rien
Les files d'attente. |
9/13 |
14/02/2011 à 21:19 |
Merci.
Les files d'attente. |
10/13 |
15/02/2011 à 20:37 |
Les files d'attente. |
11/13 |
16/02/2011 à 12:52 |
Alors je trouve l'idée vraiment pas mal. La chute est bien trouvée. On se prend au jeu du narrateur, à savoir l'attente de la fin, justement. Par contre la partie centrale est un peu trop tournée dramatiquement j'trouve.
Texte amusant, léger, chouette. (:
Les files d'attente. |
12/13 |
16/02/2011 à 13:05 |
Jolie évolution psychologique du personnage. Je ne sais pas si ça se déroule réellement comme ça en réalité, mais ton texte me donne envie de croire que c'est possible, malgré son thème improbable.
Ton absurdité est très réaliste, j'apprécie beaucoup.
Les files d'attente. |
13/13 |
16/02/2011 à 19:36 |
Merci à vous deux.
J'ai aimé "l'absurdité réaliste", d'ailleurs j'aimerais bien faire partie d'une nouvelle vague qui se nommerait pareille.