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Yabasta | Fiers de leur France (nouvelle) | 2 | 24/09/07 à 17:17 |
Les rues du Vieux-Lyon étaient calmes ces derniers temps, trop calmes. C'est sans méfiance qu'on remonte les pavés archaïque du seul quartier préservé de la modernité. Malheureusement, si St Jean est un véritable artifice médiéval, c'est aussi le repaire des nationalistes, plus connus parmi nous sous le nom de FAF (France Aux Français).
On est un petit groupe de trois. Deux d'entre nous arborent des croix gammées barrées, alors que le troisième a un badge SHARP (Skin Head Against Racial Prejudice). Aucun de nous n'a jamais eu à se battre. Des proies faciles...
On parle de tout et de rien. De politique, des émeutes visant à barrer la route de Sarkozy qui ont lieu en ce moment. On est trois. Deux filles, un garçon. Sabine, Jonathan, et moi, Kelly. On marche avec l'insouciance propre aux adolescents qui ont toute la vie devant eux.
Et puis, au détour d'une rue, apparaissent une bande de sept skinhead, que je reconnais comme les FAF contre qui nous luttons depuis des années. Sept contre trois.
La rue n'est pas déserte, au contraire. C'est l'après-midi, en pleine affluence. On aurait pu croire que les passants s'arrêteraient pour nous venir en aide. Mais c'est trop demander à la race humaine... Les gens pressent le pas tandis que Jonathan engage la conversation avec Gaël, le chef de la petite bande.
- Vous voulez quoi ?
- Baston.
- On est trois.
- La dernière fois, les SHARP étaient dix contre quatre. A la guerre comme à la guerre, chacun son tour.
Je m'apprête à réagir lorsque tout s'enchaîne. Un coup violent, venu de nulle part, rencontre mon estomac. Je titube mais ne tombe pas, plonge mes yeux dans le regard bleu empli de haine, du facho qui se tient devant moi. Cette fois, c'est un coup de ranger qui me brise la mâchoire. Je crache quelques dents et un jet de sang, et balance mon pied dans l'entrejambe du FAF qui m'agresse. Il se plie en deux et s'effondre sur le sol.
Je regarde alors autour de moi, et mon coeur s'affole en voyant Jonathan à terre. Cinq des sept fachos le rouent de coups, alors qu'il semble déjà inanimé.
- Arrêtez ! tenté-je de crier, mais c'est peine perdue.
Sabine, elle, se tient le nez en gémissant. Des flots de sang s'en échappent, tandis que le natio qui lui a fait ça affiche une expression satisfaite. Je voudrais les tuer. Mais que puis-je faire, avec mes 1m50 et mes 40 kilos, face à eux ?
Le cauchemar cesse enfin. Les fachos s'enfuient en riant, abandonnant Jonathan, qui git sur le sol. Evanoui.
Nous sommes aux urgences. Nous avons tenu à accompagner le SAMU qui a amené notre ami à l'hôpital. Un silence pesant règne sur cette salle blanche angoissante. Sabine le rompt enfin. Une ecchymose violacée cerne son oeil droit.
- Pourquoi ils sont si fiers de leur France, dis-moi ?
- Parce qu'on leur a bourré le crâne.
- Pourquoi ils sont si influençables ?
- Ils cherchent leur personnalité, ricanai-je.
Ce rire me cause des élancements douloureux. Sabine se tait, alors que je répète pour moi-même :
- Si fiers de leur france...
Fiers de leur France (nouvelle) | 1/2 | 24/09/2007 à 17:23 |
Fiers de leur France (nouvelle) | 2/2 | 24/09/2007 à 17:30 |