Une journée à Montparnasse, c’est comme passer son temps à se balader dans une énorme galerie marchande : du cher, du beau, du « m’as-tu vu » à chaque coin de rue. Alors que Marco, Franck, Sébastien et moi-même, Jimmy, nous promenions dans le jardin du Luxembourg, à discuter de tout et de rien, Franck et son petit nounours rose, comme il disait, passèrent devant un jardin d’enfant. Bac à sable, toboggans en plastique, tourniquet, balançoires…Bref, la parfaite panoplie du bambin moderne. Franck tomba en admiration totale et complète devant une petite fille qui bavait sans ménagement sur la robe de sa mère, juste avant d’éternuer et de se moucher sur son petit pull à rayures roses.
Franck se rapprocha avec à son bras Sébastien :
- Ohhhh, regarde cette fille, elle est sublime !...Bonjour, petite fille, fit il en accompagnant une grimace
- Ouai, ouai, magnifique, t’a raison. Enfin tu sais, chéri, moi et les gosses…
Tandis que Marco discutait avec moi de fringues diverses et variées, je m’approchais à mon tour de la frimousse à couette.
- Oh, joie ! De la marmaille plein la cour ! Tient, regarde Jimmy, le T-shirt de la gamine, ça prouve tout à fait la tendance de l’été : aéré, nuance rosée, dit-il avant de s’adresser directement à la mère de la petite fille. Dites-moi, madame, vous savez en quelle matière est le petit haut de votre charmante fille ?
Tandis que top-model junior écrasait la femme d’une tonne de question technique, je me rapprochais en douce du couple éternel-love. Franck semblait catastrophé que l’amour de sa vie, Sébastien, n’aime pas les enfants. Il avait l’air vraiment bouleversé. Apparemment, Sébastien ne voulais pas d’enfant alors que c’était un des rèves de son amant. Je décidais que nous ne devions pas moisir dans cette ambiance, aussi je poussais un Franck bouleversé vers la sortie tout en tirant Marco par le bras qui cria encore à la mère :
- Mais dites moi au moins si c’est LAVABLE À 30° !!! S’il vous plaiiiiit !!!!!!!
Deux heures plus tard, nous laissions Franck et Sébastien en pleine discussion existentielle sur la monoparentalité, alors que leur train passait. Je restais donc sur le quai avec Marco. Mais même celui-ci s’était éloigné pour draguer un autochtone. Je méditais, seul comme un ado perturbé, au milieu d’un monde qui ne me comprenait pas, comme il ne comprenait personne. Alors que je faisais une bise de loin à Marco, encore trop occupé à faire du rentre-dedans à son espèce de rugbymen, un homme monta dans le même wagon que moi et cracha à mes pieds.
- Sale pédale !
Je me retournais et, avant d’avoir pu dire quelque chose, je me rendais compte que je ne savais pas quoi répondre. Il avait touché au point sensible. Moi, Jimmy, jeune lycéen, ne s’acceptait pas tant qu’il voulait le faire savoir…Aussitôt rentré, je me précipitai sur les deux seules choses capables de me remonter le moral : une glace au chocolat, et le téléphone. Ce dernier sonnait mortellement occupé, chez tout le monde. Apparemment je n’étais pas le seul à utiliser ce moyen pour évacuer le mal-être. Je me dirigeais alors vers l’ordinateur, mettait une musique qui sonnait le désespoir, et éteignait les lumières. Je feins de dormir lorsque ma mère rentra du travail. Les chiffres lumineux du réveil indiquaient 20h15, quand elle frappa doucement à ma porte. Sans réponses de ma part, elle entra et me découvrit allongé sous un drap qui me recouvrait entièrement.
- Sérieusement, tu penses vraiment, qu’avoir des enfants est une finalité ? Demanda Seb.
Nous étions parti à « la maison ». Le Marais : un arrondissement où le gay pouvait trouver tout ce qu’il voulait : des vêtements, des bijoux, des boutiques et des bars branchés et, enfin, des hommes en quantité.
- Je ne sais pas…Tu sais, des couples vivent très heureux sans progéniture !
- Tu parles de ça, comme s’il s’agissait d’un accessoire de maison ! dit-il, Non, apparemment, Franck tient vraiment à en avoir un. Seulement si je continue à le fréquenter, et Dieu sait si j’en ai vraiment envie, il finira, à sa majorité, par vouloir s’engager et puis élever un…bébé !!
- Et toi tu n’en veux pas, je sais…
- Arf ! Je suis désolé, darling…tu voulais me parler et je te monopolise complètement avec mes soucis ! Oh, fabuleuse, cette paire de chaussure, tu ne trouves pas ?
J’hésitais à en parler avec lui. Ses 22 ans n’en faisait pas un oracle, mais il avait bien plus d’expérience que moi, dans le milieu. Je lui confiais donc l’insulte que ce mec m’avait lancée tel un pieu dans le cœur. Il ne sembla pas y apporter une grande importance.
- Tu sais, Jimmy, les homophobes sont tous pareils : aucune subtilité, aucune argumentation, juste des insultes et la connerie qui va avec…Avec le temps tu apprendras à laisser glisser ces vulgarités sur toi, crois moi.
- Nooon mais il a dis ça avec une telle agressivité ! j’ai cru qu’il voulait me tuer !
- Allons, ajouta-t-il, ils ne sont pas tous aussi hitlérien ! La majorité ne nous comprennent pas, c’est tout ! Laissons les dans l’ignorance, ça vaut mieux pour nous !
Et il se rua sans ménagement sur une vert pomme, en me suggérant d’oublier cette histoire ; Au fond de moi, je pensais que je devais sans soute croire ce que Sébastien disait, mais j’avais tellement de mal à me faire à l’idée qu’il puisse y avoir tant d’intolérance gratuite, que je me précipitais sur une nouvelle coupe de glace au chocolat dans le bar le plus proche.
A quelques kilomètres de là, Franck s’exerçait à « l’élevage » d’enfants. Sa voisine de pallier venait d’apprendre que son fils aîné se trouvait à l’hôpital à cause d’une cheville brisée, et elle avait débarquée en catastrophe pour savoir s’il accepterait de s’en occuper. Il saisit l’occasion immédiatement, pour éprouver quelques heures ce que c’était de s’occuper d’un enfant.
- Oh ! Vous êtes vraiment charmant, Franck. Mais vous êtes sur que vous ne voulez pas au moins une petite rémunération pour cet immense service ?
- Non, merci Jeanne, ça ira. Ca me fait plaisir.
Elle le prit dans ses bras et lui indiqua où se trouvaient tous les éléments essentiels avant de partir en quatrième vitesse vers son autre fils. Franck attrapa le téléphone et m’appela.
- Tu ne devineras jamais ce que je suis en train de faire, dit-il…
- Tu brosses le dentier de ton grand père ?
- Haha, très drôle…Je fais du baby-sitting !
Il parlait ave cette voix très aiguë, que j’attribuais généralement aux hystériques et autres malades psychotiques.
- Et alors comment tu t’en sors ? Demandais-je, avant d’allumer la télévision.
- Plutôt bien, je dois dire. Le petit Brandon est adorable !
- Brandon ? Et où sont Dylan, Chéryl, Mickaël et Cindy ?
- Désolé, Jim, mais les feux de l’amour, c’est sur canal-dingus…Dis-donc, toi…Tu n’es jamais cynique, tu es sur que ça va ?
Sentant que je ne pourrais pas mentir à mon ami, je lui révélais l’expérience que le PORC m’avait fait subir (j’avais trouvé ce surnom qui signifiait Pitoyable et Opprimant Ressortissant du Crétinisme). Franck était catastrophé, comme tout meilleur ami qui se respecte… Catastrophé mais résigné. Il m’expliqua que je devais m’y faire, que c’était le lot de tous les homos.
- Que veux-tu ? La société ne nous accepte pas, nous sommes les parias !
- Mais moi je pense vraiment que nous pourrions être acceptés !
- Chéri, on le veut tous, mais nous sommes arrivés trop tôt ! le monde n’est pas encore capable de comprendre notre valeur !!!
- Notre valeur ?
- Bien sur…que feraient les hétéros sans les décorateurs gays, les stylistes gays, les coiffeurs gays, les acteurs gays ?
Là, Franck n’avait pas tort. A 17 ans, il avait trouvé la bienfaisance homosexuelle…Mais alors, pourquoi nous rejetaient-ils ? Je n’eut pas le temps d’avoir ma réponse, car un bruit apocalyptique se fit entendre par le combiné, suivit d’un « écoutejetelaissebonnechancej’aiunproblèmeaplus » !
Le samedi suivant, je me sentais déjà mieux. Nous étions tous ensemble, quand Seb aborda le sujet.
- Alors, Jimmy, tu as réussi à t’endurcir ?
- T’endurcir ? Attend tu veux quand même pas devenir hétéro !, se plaignit Franck, avant de faire ses grand yeux « s’il te plaiiiiiiiiiiiiiiiiiit »
Je mis les choses au point, surtout pour Marco qui n’était au courant de rien…Il avait passé la semaine avec son beau rugbyman. Il m’expliqua se qu’il pensait des PORCs :
- Jim, chéri. T’a pas besoin de t’en faire pour ça ! Si les crétins s’en prennent à toi c’est parce qu’ils sont jaloux !
- Jaloux ? comment ça Jaloux ????? dit Franck, qui faisait tourner sans relâche sa cuillère dans son thé à la menthe
- Les hétéros, commença Marco comme si Franck était doté d’hyperémotivité, sont jaloux de notre capacité au pieu.
- Arrête, chéri, dit Seb. Les homophobes ne sont pas comme ça ! ils sont justes…con ! finit-il avant d’engloutir un croissant d’une taille impressionnante
- Une fois moi, continua le beau blond comme si personne ne l’avais interrompu, un hétéro m’a sorti « hey, pétasse ! tu me fais une pipe ?! »
- Et alors, t’as dis quoi ?
- Je lui ai fait sa pipe, conclut-il normalement. Il est devenu homo depuis.
- Ah bon ? Et on le connaît ?
- Bien suuuuuur ! c’est Priscilla ! tu sais au love-tunnel dans le 3ème arrondissement !
Je me remémorais la drag-queen qui nous avait servi ce soir là…Priscilla, le mec le plus efféminé que je connaissais, était en fait un hétéro converti. J’éclatais de rire, ils n’étaient peut-être pas si sur d’eux finalement ! Mais, si jamais je me retrouvais dans une situation similaire, aurais-je le courage d’aller au bout de cette pensée ?
Par la suite, nous allâmes nous exposer au soleil de cette fin d’été. La fin des vacances approchait, et la chaleur finirait par partir tôt ou tard. Franck et Sébastien étaient repartis dans une discussion sur une possibilité d’avoir un enfant un jour. Il s’avérait que le baby-sitting de Franck avait été une catastrophe, et que l’appartement de sa voisine avait été retrouvé complètement saccagé…Ce qui laissait Seb de marbre. Finalement, Franck s’était rendu compte qu’il n’était pas encore prêt pour éduquer un enfant. Il se laissait 10 ans pour y réfléchir plus en profondeur…Au moins le temps pour lui de terminer ses études. Marco, quand à lui, maudissait le rugbyman qu’il avait finit par ramener chez lui, découvrant alors qu’il s’agissait d’un balayeur de rue… « Je n’ai pas pu…le fantasme a été complètement détruit…Et me revoilà à nouveau sans avoir pu m’amuser avec un joli manche…La vie est mal faite ». Quand a moi, je décidais de partir. Ces débordements de la gayitude commençaient à m’échauffer. Un peu de solitude me faisait le plus grand bien, et j’étais là, à déambuler dans les rues de Paris, en me demandant pourquoi j’avais tant de mal à m’accepter. Devions nous baisser les yeux à chaque insulte homophobe ? Ou au contraire faire face et se montrer aussi mordant que le PORC ?
En rentrant chez moi, par le RER, je croisais à nouveau le PORC qui m’avait insulté la première fois.
- Hey, la tarlouze ! dégage, tu vois pas que les chiens sont interdits dans ce train ?
Je me levais tranquillement, priant le ciel de m’accorder une infinie patience, et je m’approchais de lui. Alors que je m’apprêtais à répliquer, un père de famille assis à quelques mètres se leva également et, avant que je ne dise quoi que ce soit, lança au PORC :
- Mon cher monsieur, rien ne me ferais plus plaisir de quitter le wagon dans lequel se trouve un parfait crétin.
Avec le sentiment de n’avoir rien fait de bien, je quittais le train, et je remerciai l’homme qui m’avait défendu comme ça.
- Vous savez, il n’y a pas que des idiots dans ce monde ! dit-il.
Alors que j’attendais le train suivant, j’espèrais que ce monde dans lequel nous vivons se dirigeait plus vers la tolérance et l’entraide. Et que moi, je pourrais être là pour le voir.
La Gayrilla lycéenne, chapter 2Une journée à |
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17/08/2005 à 13:24 |
Hey j'adore !!!!! Y a une suite ?
et
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17/08/2005 à 14:53 |
c'est trtop cool a quand l suite ?
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17/08/2005 à 15:10 |
Encore meilleur que le premier chapitre Jimmy,continue comme sa.C'est vraiment super.
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17/08/2005 à 15:13 |