Un jour, moi aussi.

Souvent utilisé pour les éditos de mes blogs, je ne pense pas avoir déjà posté ce texte ici afin de cueillir quelques avis critiques. J'y remédie donc, espérant que la collecte soit fructueuse.

Je longe et arpente ce long couloir plongé dans l'obscurité. J'avance à tâton, une main en avant, un pied devant l'autre, hésitant... Ca sent la mort, ça sent l'oubli. Des bras cadavériques plantent leurs ongles dans mes mollets, s'agrippent aux pans de ma robe. En un espoir vain d'avance, ils agitent fébrilement des paquets de feuilles dans le vide. Leur temps est compté. Ils reposent leur honneur sur le mien.

À la dérobé, je sauve quelques oeuvres, poussiéreuses et humides. Des voix maladives m'interpellent, me gémissent des prénoms pour ne pas finir anonymes en plus d'inconnus. Je m'excuse, leur dis que leur signature ne sera qu'une pensée pour leurs visages égarés dans la pénombre des lauriers...

J'imagine derrière moi tous ces autres malheureux qui s'accrochent, piétinant mes pas, en rang d' oignons désorganisé. Je traîne trop... Ils se rapprochent.

Les plus hautains n'étant plus à ça près, s'élançent parmi les corps croulants puis s'effondrent un peu plus loin sous des huées déchaînées. Bien fait.

" Elle est encore loin, la Gloire ? "

Au fond de l'éternel corridor, comme en réponse à cette lugubre question oratoire, les rouages d'une porte métallique s'actionnent. Le silence est surplombé par des grincements stridents qui, d'aussi loin qu'ils proviennent, agressent nos tympans et nous triturent les entrailles d'un perfide acide jaloux. Une fraction de seconde plus tard, l'accès se referme lourdement.

" Encore un putain d'chanceux. "

Quelques humbles poètes applaudissent. Les autres grognent... Son bonheur réduit le nôtre. Reste plus qu'à espérer que le choix ne soit pas arbitraire et que le talent soit payé. Encore faudrait-il parvenir à la fin...

Plusieurs s'affalent contre les cloisons irrégulières. Ils abandonnent. Je persévère. Je percerai l'incognito, coûte que coûte. Je ne mendierai pas plus longtemps au seuil du Succès.

J'ignore combien nous sommes exactement à s'imaginer un jour sous les feux des projecteurs, brandissant un simple ouvrage avec notre titre, notre nom... Des centaines ? Des milliers ? Pour combien de gagnants, en définitive ?

Je sais simplement que tout ces bâtons placés dans mes roues n'ont fait qu'accroître ma rage de vaincre... Et bien que ralentissant mon ascension sur le podium privilégié, uniquement par orgueil, par défi personnel, j'atteindrai la plus haute marche et les narguerai tous autant qu'ils seront à avoir souhaité mon échec durant toutes ces années.

© Noémie, Juin 2007.

Am Stram Gram.

Tutafay  

Un jour, moi aussi.

1/6

19/01/2008 à 08:48

Wow j'adore ... le style

Franchement j'adore lire de tels textes

Chapeau pointu  

Un jour, moi aussi.

3/6

19/01/2008 à 09:57

U_utopiste a écrit :
Wow j'adore ... le style Franchement j'adore lire de tels textes

+ 1

Un jour, moi aussi.

4/6

19/01/2008 à 10:46

J'adore!

Un jour, moi aussi.

6/6

19/01/2008 à 15:50

Que répondre ? Merci ?
Oui, merci. Merci à vous pour votre fidélité et vos compliments qui, somme toute, me touchent toujours bien au coeur. C'que c'est fonderwul d'avoir des lecteurs comme vous.

Am Stram Gram.