Dans la série "j'ai testé pour vous..."
...Une journée entière à arpenter les rayonnages de jouets d'une célèbre enseigne. Et Dieu, c'est triste.
Le mot tombe, comme ça, en deux syllabes; l'une un peu trop labiale, un Bla qui tombe à plat, et l'autre qui ne décolle pas plus, un Sant qui s'accroche au bitume d'une dure réalité.
Blasant. Pas plus, pas moins, aussi court que sans appel.
Sachez tous qu'avant, j'étais comme beaucoup d'autres; je m'en faisais un monde de ce marché de jouets, une magie, une illusion, mon Paradis, mon heure de gloire. Étrange, n'est-il pas ? Je vous l'demande. N'est-il donc pas étrange combien l'attente du désir est davantage jouissive que sa satisfaction ?
Durant tout le voyage, nous étions impatients, discutant le bout d'gras, rêvant d'une nouvelle vie...
Pour en arriver où ? Là, perchés au dessus d'une foule, entassés, à l'étroit.
Pour parvenir à quoi ? À pas grand chose; lisez.
Un enfant me regarde. Un de ces mômes ignares, les yeux qui crèvent d'envie de tout avoir : du camion rouge à la poupée. Un de ces mômes aux doigts tâchés de feutres, qui se tripotent les lèvres devant toutes ces babioles. Et qui, déjà, se voit plus beau costumé en pirate, se voit plus fort sur un nouveau vélo. Sans petites roues, siouplé, merfi.
En bref un de ces mômes qui, inévitablement, n'en aura jamais la moitié. Car voilà maman qui surgit, le saisit par la main et l'arrache à son rêve, à sa torture, son égarement. Et il s'en va. Il braille, il gesticule, pique sa crise, son caprice, essaye le chantage... Il disparaît. Comme il était venu, au coin de l'étalage, empoigné par sa mère avant d'être prisonnier d'un mauvais conte de fée...
Alors arrive un couple. Encore une fois, c'est l'histoire d'un regard. Adulte, cette fois-ci, mais si vous saviez comme ils n'en sont pas moins marquants et durs à soutenir.
La femme semble perdue, amère, préoccupée. Dans sa peine, elle paraît s'en vouloir. Et je devine à son habit que les fins de mois sont pas faciles, et que jamais, non plus, elle ne pourra offrir un seul d'entre nous à l'un de ces bambins.
Aussi, elle promène ses prunelles en une ballade vaine, les fait traîner sur l'étagère, comme si elle espérait, je ne sais trop comment, pouvoir les oublier... ici, ou là. Afin qu'elle ne voit pas la bouille de ses enfants quand au pied du sapin eux ils ne verront rien, ou sinon pas grand chose, ou pas ce qu'ils voulaient...
Soudain, dans un élan fébrile, l'homme s'accroche à son bras. Un sourire plein d'espoir trop vite consumé : il pointe de son majeur une petite poupée. C'est mon modèle réduit, et z'avez ma parole qu'il n'y a que la taille qui ait eu un rabais...
Alors ils s'en allèrent, comme ils étaient venus. Le cœur au bord des lèvres pour des trous dans les poches. Quelques miettes de bonheur dans leurs paumes moites et des histoires de fête qui se tissent dans leur tête. Sans sous, sans espoir, l'esprit sans dessus dessous, un Noël chaviré, qu'il faut réinventer...
Et puis ! Que vois-je ! Un marmot qui trotte en couche culotte au milieu du couloir, chaussé, non sans peine et encore moins de goût, de baskets qui font "pouet" à chacun de ses pas ! Ou peut-être "couic", enfin, un bruit qui fait que bon nombre de personnes auraient peut-être voulu que ce têtard naisse cul de jatte.
Et je suis crue... parc'que blasée.
D'ailleurs son père lui court aux fesses et lui, il cri. "Matiméo ! Matiméo" J'y crois pas. Matiméo, 46 ans et PDG, te saluera un jour, mon vieux. Et si tu ris, tu seras aussi bien culotté qu'il l'est dans son slip Pampers...
Pour abréger, ils défilent tous. Des friqués un peu trop péteux, ingrats, indécents, qui ravagent les stocks et partent en manœuvrant un caddie qui déborde.. jusqu'aux grands parents qui listent, un à un, ce que leurs gosses leur dictent, - et même ce qu'ils ne dictent pas- . Pour le plaisir d'offrir, qu'ils pensent. Pour mieux les pourrir, j'ajoute.
Vraiment, il y a de tout.
De la maman enceinte qui anticipe de trop les jeux "3 ans et +" et les figurines de soldats ou de super héros, jusqu'à l'enfant qui, sur les épaules du papa, attrape une trompette et la cache sous son pull...
J'ai pas mon mot à dire, je sais. Seulement quand je repense, ce soir, aux petites mains puériles, aux doigts fins, potelés, aux gestes enfantins qui ont pu m'emboîter, me peindre, me construire, j'en ai la gerbe au ventre, une boule dans la gorge, un poids dans l'estomac. Et ma vie de poupée vient de perdre son sens, je deviens trop humaine. J'étais là pour distraire, j'ai envie de pleurer.
Blasant. C'est l'mot. Si si.
Et finalement je vous dirais que la vitrine de pantins et de conneries qui servent à rien, c'est certainement pas eux qui, au jour d'aujourd'hui, en ont eu l'aperçu...
Un écrit nocturne, pour ne pas déroger aux vieilles habitudes; quoique pour le coup je n'ai su y mettre tout le sens et la profondeur dont j'aurais souhaité le pourvoir, m'enfin... Advienne que pourra.
Am Stram Gram.
Muñeca désabusée. |
1/7 |
11/11/2009 à 17:54 |
J'aime bien l'idée et le texte, mais sans plus.
Je ne pense pas que ça aurait vraiment collé avec ton idée mais j'aurais utilisé un langage plus beau et soutenu pour accentuer le contraste entre une poupée sensée être douce et amusante et sa manière de penser.
Muñeca désabusée. |
2/7 |
11/11/2009 à 18:00 |
D'habitude j'écris dans un registre plus soutenu c'est vrai, mais là, justement, j'ai préféré éviter les tournures emphatiques parce que la poupée à beau être un jouet féminin et doux, elle reste simple.
Enfin, je pense quand même le retravailler !
Merci pour ta remarque
ASG.
Muñeca désabusée. |
3/7 |
11/11/2009 à 18:05 |
Et je suis crue... parc'que blasée.
Aïe... Ca fait mal de lire ça.
Je n'ai pas accroché, mais alors vraiment pas. Je préfère de très loin la plupart de tes autres textes.
Mais il y a quelques bonnes idées dedans, notamment le très joli passage (à mon sens) :
Alors ils s'en allèrent, comme ils étaient venus. Le cœur au bord des lèvres pour des trous dans les poches. Quelques miettes de bonheur dans leurs paumes moites et des histoires de fête qui se tissent dans leur tête. Sans sous, sans espoir, l'esprit sans dessus dessous, un Noël chaviré, qu'il faut réinventer...
Du bon et du moins bon, donc.
Muñeca désabusée. |
4/7 |
11/11/2009 à 18:11 |
Oui, je me doutais bien que ce changement allait déplaire à certains
Qui ne tente rien n'a rien ! *adore ces proverbes qui dépannent x)*
Merci à toi
ASG.
Muñeca désabusée. |
5/7 |
11/11/2009 à 20:32 |
Bah ma foi, mouah j'aime plutôt. M'enfin le 'parc'que blasée' et le 'sisi', je les ai trouvé un peu hors contexte.
Muñeca désabusée. |
6/7 |
11/11/2009 à 21:16 |
Et ben et ben, j'ai vraiment adoré !
C'est vraiment parfait, ça coule tout seul, ça sonne bien, et j'aime beaucoup l'histoire.
Donc vraiment, bravo pour ce texte !
Y'a une phrase que j'ai adorée, je ne sais pas pourquoi, c'est : "J'étais là pour distraire, j'ai envie de pleurer. "
C'est peut-être parce que c'est un alexandrin et du coup, inévitablement ça sonne bien, et puis le côté symétrie assymétrique de la phrase, je ne sais pas ... mais elle me percute, j'adore !
(y'a juste le "au jour d'aujourd'hui" que je n'aime pas. Je ne sais pas si tu as volontairement employée cette expression populaire et redondante, si c'était un choix, mais en tout cas, j'aime pas)
Ne finissons pas sur une note négative : bravo !
Muñeca désabusée. |
7/7 |
11/11/2009 à 21:20 |
(ah et aussi, ce que je n'aimais pas dans la plupart de tes textes, c'était le côté trop de vocabulaire, trop lourd, trop maniéré. Là ça reste très "écrit", mais c'est plus simple, et je préfère largement !)