Bonjour à tous.
Je poste un peu à chaud mais j'aime bien ce texte. (Ça me rappelle du Barricco, pour ceux qui connaissent.)
Merci d'avance à ceux qui liront et critiqueront.
Flash !
Tu es assise assez bas dans l’auditoire quand tu le vois pour la première fois. Il entre encadré par deux amis à lui et s’installe dans la rangée juste en dessous de la tienne. Tu penses : lui, le garçon avec les cheveux ébouriffés, lui.
Pendant le cours, tu l’observes. Il porte un pull en laine bleu foncé. Tu trouves que ça lui va bien, la façon dont le tissu lui enserre les épaules.
A la pause, tu le vois dire bonjour à une dizaine de personnes. Il est debout, fait la bise aux filles, serre la main des garçons. Il adresse quelques mots à chacun d’entre eux, écoute ce qu’ils répondent en penchant la tête sur le côté.
Tu n’entends pas ce qui se dit mais tu remarques qu’il sourit beaucoup, comme pour ponctuer ce qu’il raconte. Ses commissures se relèvent soudainement et, flash !, éclat de dents blanches. Au bout d’une fraction de seconde, le scintillement premier a disparu. Ce n’est plus que l’idée du sourire qui s’attarde sur son visage, comme les tâches jaunâtres qui s’effacent doucement de tes rétines après que quelqu’un t’ait pris en photo.
Il est de nouveau là la semaine suivante et à la pause, tu le désignes à l’amie qui est assise à côté de toi. Elle hausse les épaules, pas intéressée, et ça te surprend parce qu’il est tellement conquérant, tellement sûr de lui : tu croyais que tout le monde l’avait remarqué, que tout le monde le voyait comme toi tu le vois. Elle finit par dire, à moitié pour te faire plaisir, qu’il a un beau sourire, et tu penses oui, oui, exactement.
Après ça, le monde se met à tourner en une spirale floue autour de toi. Tu ne prêtes attention qu’aux battements de cœur qui résonnent dans tes oreilles – il te semble que ton cœur bat très lentement, très calmement, dix ou douze pulsations par journée. Certaines images s’impriment brièvement dans ton esprit, clignotent faiblement avant de disparaitre.
Il répète ton prénom après que tu te sois présentée, trainant sur les syllabes ; plus tard : tu es assise à côté de lui au cours et il rit gentiment à tes plaisanteries chuchotées ; plus tard : son regard particulièrement attentif quand tu lui parles de toi ; plus tard : sa main sur la tienne ; plus tard : un flash de lumière blanche après qu’il t’ai embrassé et tu détournes le regard.
Et la spirale s’arrête et soudain tu es là, à côté de lui. Les draps sont doux sur ta peau mais la seule pensée qui te vienne après ce qui vient de se passer, c’est à quel point il était courtois et ses caresses étaient courtoises et ses gémissements étaient courtois et même son orgasme était courtois, putain.
Pendant que tu te demandes un peu perplexe pourquoi tu considères sa courtoisie comme un défaut, vous vous promenez main dans la main sur le campus. Il s’arrête tous les dix mètres pour saluer quelqu’un qu’il connaît, passe son bras autour de tes épaules et te présente à chacun de ses interlocuteurs. A chaque fois, c’est pareil, la personne en face te lance un regard curieux puis se détourne, se concentre uniquement sur lui.
Tu remarques qu’il ne parle pas beaucoup, se contente d’écouter en mitraillant ses sourires – flash !, flash !, flash !
Tu remarques qu’il est toujours d’accord avec tout le monde.
Tu remarques que les gens recherchent sa compagnie, qu’il se fait sans cesse inviter partout.
Son copain lui donne une petite tape sur l’épaule, te fait un signe de tête puis s’en va et lui se tourne vers toi, flash !, et propose de t’offrir une glace. Tu te sens céder, il est charmant, tu te dis que tu as de la chance.
C’est exactement ce que tu voulais : quelque chose de stable sans être vraiment sérieux. Vous vous retrouvez deux ou trois soirs par semaine. Tu lui as donné une clef de l’appart’ pour qu’il n’ait plus besoin de sonner. Quand tu sais qu’il va venir, tu l’attends en lisant dans ton lit, le dos tourné à la porte. Il arrive sans bruit, tu ne te retournes pas, tu l’entends enlever ses chaussures puis il se glisse sous tes couvertures, t’entoure de ses bras, colle son son torse contre ton dos et tu te sens chez toi, ce qui n’a pas vraiment de sens puisque tu y étais déjà.
C’est toujours toi qui choisis les films que vous regardez à deux. Tu fais ça soigneusement, nerveuse à l’idée de te méprendre sur ce qui lui plaira. Tu te rends compte que tu n’as aucune idée de ses goûts. Quand tu lui demandes quel genre de films il aimerait voir, il te répond que, flash !, peu importe, que l’important c’est d’être avec toi.
Tu lui demandes alors s’il aime lire et oui, non, pas spécialement mais il serait très heureux que tu lui recommandes un bouquin, il adore, flash !, que tu sois si cultivée, et vas-y, fais-lui découvrir quelque chose.
Tu lui prêtes ton roman préféré et quelques jours plus tard, quand tu le rejoins à la cafétaria, il est en train d’en lire les dernières pages. Tu l’observes en silence pendant qu’il termine.
Alors, qu’en a-t-il pensé ? C’était bien, mon cœur, murmurent ses lèvres dans ton cou, merci, merci de me l’avoir fait lire, je n’ai plus faim, tu veux mon yaourt aux fruits ? et tu sais que c’est une réponse charmante mais c’est aussi à peu de choses près ce qu’il t’a dit il y a deux semaines, après que vous ayez visionné ton film favori. La lumière avait crépité sur ses crocs et il avait été incapable d’expliquer pourquoi ça lui avait plu. (D’ailleurs ça n’était pas tellement important, il était un peu surpris que tu tiennes tant à savoir, allons au lit ma belle, je suis fatigué.)
Ça semble être l’étape suivante logique alors tu l’emmènes diner chez tes parents. Il complimente ta mère sur le repas, ou peut-être le choix du vin, ou peut-être la décoration d’intérieur et elle penche la tête, ravie, rougissante. En un éclair, tu te souviens que tu avais eu exactement la même mimique le soir où il t’avait murmuré que tu étais jolie. Tu serres les poings sous la table, tes ongles trop longs laissent des marques en pointillés dans ta paume.
Il demande à ton père des précisions sur son boulot et tu te rends compte horrifiée que, malgré les apparences, il n’écoute pas du tout les explications de ton paternel, il est cent kilomètres plus loin, ailleurs, et ton père est flatté par son intérêt, quel charmant jeune homme que ma fille nous a ramené là, et ça te fait mal, tu as envie de gifler l’un et l’autre.
Ce soir-là, tu as la tempe posée sur sa poitrine, tes jambes emmêlées aux siennes et tu songes que tout est allé tellement vite : tu le connais si peu. Tu chuchotes dans le noir : je ne te connais pas assez, dis-moi, qu’est-ce qui t’intéresses dans la vie, qu’est-ce que tu aimes ? Il répond qu’il t’aime, toi, et c’est la première fois qu’il le dit. Le quiproquo est si stupide que tu as envie d’hurler.
Tu te lèves, l’embrasses sur le front dans un simulacre de tendresse pour qu’il ne s’inquiète pas (mais c’est inutile, tu sais qu’il ne s’inquiète pas) et murmure que tu vas prendre l’air. Tu sors sur le balcon en pyjama, il pleut, la cigarette est difficile à allumer, la fumée fait des arabesques grisâtres.
La nicotine te calme, tu trembles maintenant de froid et non plus de fureur. Tu retournes te coucher, mouillée, sentant le tabac froid, glacée, penaude. Il ne fait pas de commentaires.
Le lendemain est un autre jour, le soleil caresse légèrement tes épaules et vous marchez de nouveau à deux sur le campus. Comme d’habitude, il s’arrête à chaque pas pour parler à des connaissances. Tu le regardes maintenant avec plus de sagacité et tu réalises à quel point tout ça est important pour lui, à quel point il ne peut pas s’empêcher d’être poli et aimable, éminemment aimable, avec tout le monde. Ses sourires ne sont que des étincelles qu’il projette pour détourner l’attention du fait qu’il ne s’intéresse vraiment qu’à l’image que les gens ont de lui. Il veut être apprécié mais n’apprécie vraiment personne. Comment pourrait-il ? Il ne prend jamais le temps de réfléchir à ce qu’il pense de quelqu’un ou de quelque chose.
Tu te demandes si c’est pour ça qu’il est avec toi, parce que tu en avais envie et qu’il ne voulait pas te décevoir, parce qu’il ne voulait surtout pas manquer une occasion d’être charmant.
Il revient vers toi avec un cornet citron framboise que tu ne te souviens pas d’avoir demandé et tu te trouves cruelle. Une autre chance, décides-tu, et vous vous asseyez sur un banc. Tu te penches vers lui.
Hier tu as dit que tu m’aimais. Oui. Pourquoi ? Comme ça. Comme ça ? Comme ça.
Le flash te laisse toute éblouie et pendant que tu clignes des yeux, il t’embrasse en traître. Sa bouche goûte le chocolat, ça t’agace parce que ça ne va pas avec le citron qui fond sur ta langue.
Tu ne dis plus rien. Tu te sens confirmée : il ne s’intéresse qu’à ton affection, pas à ton bonheur.
Tu te rends bien compte que tu ne vaux pas mieux : tu ne l’apprécies que parce que parfois tu te sens bien quand il est là. Tu ne tiens pas particulièrement à ce qu’il soit heureux, tu veux juste, toi, être heureuse avec lui.
Tu romps avec lui dans ton esprit. Ça te donne le vertige. La glace est soudain désagréablement froide dans ta bouche et te donne mal à la tête. Les larmes te montent aux yeux. Tu trouves une excuse pour t’éloigner parce que tu sais que tes sanglots le mettraient mal à l’aise. Tu ne l’as jamais vu pleurer et tu as du mal à imaginer que ça puisse lui arriver. Pour ça, il faudrait qu’il se laisse atteindre et il est tout le temps tellement loin derrière ses explosions de magnésium.
Il te laisse partir sans protester. Respirer est un peu douloureux. Tu le détestes de ne pas te retenir.
La rupture proprement dite ne te laisse aucun souvenir. Il a probablement demandé pourquoi, tu as probablement dit que tu étais désolée, il est parti, tu es restée.
Tu espères à moitié qu’il appelle et te dise enfin quelque chose de sincère, j’ai mal je ne veux pas qu’on rompe tu me manques ma chérie mon amour.
Il n’appelle pas.
Le lendemain, tu t’installes à ta place habituelle, au bas de l’auditoire. Il arrive un peu plus tard, bien entouré, comme d’habitude. Il t’aperçoit de loin, tu le vois découvrir ses dents au ralenti, tu paniques un peu, te dépêches de détourner les yeux mais il est déjà trop tard – flash !
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06/07/2010 à 12:57 |
Aha, si ça plait même aux garçons...
Merci à vous les gars.
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06/07/2010 à 19:26 |
C'est bien écrit
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08/07/2010 à 17:36 |
J'aime tout. Le style, le fond, la forme. Cependant il est vrai que ça fait un peu court pour une nouvelle. Mais bon
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08/07/2010 à 17:40 |
Ahhhh, je me rends compte que j'ai pas dit que je trouvais ça assez triste en effet.
Et je l'ai relu une deuxième fois tiens, bah c'est toujours aussi plaisant. Bien joué =)
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08/07/2010 à 19:50 |
J'ai jamais apprécié le tutoiement dans les bouquins. Ce qui a dû jouer dans le fait de ne pas avoir accroché au texte.
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10/07/2010 à 19:37 |
c'est vrai que tu écris bien,malgré que ce ne soit pas mon genre de lecture j'ai aimé
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09/08/2010 à 15:36 |
sorry, tu va avoir un mauvais commentaire :/
C'est bien écrit mais... Ca n'a pas de sens " Ce que tu veux c'est etre heureuse avec lui mais pas qu'il soit heureux, et lui de même... je suis sur qu'il t'aimait mais tu as décidé que ce n'était pas ca, si il t'a laissé tomber c'est normal, il avait bien vu que tu n'avais plus cette affection (affection que tu n'arrive pas a lier au faite qu'il t'aime). Ensuite tu attends qu'il te rappelle, qu'il te dise quelque chose de sincére, il a toujours été sincére, il n'aimait pas tout exprès pour etre avec toi, il t'aimait DONC il s'intérèssait, parfois a tort, a toi...
Voila, il est la victime et tu me déteste pour ne plus t'aimer, alors que tu lui a fait du mal.
ca n'a rien de méchant, voila ma critique, tu dois en prendre compte et cela vaut mieux qu'un c'est bien ecrit, ce qui est vrai comme je l'ai dit
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09/08/2010 à 22:06 |
Thivcoffee >
Une fiction est une histoire fondée sur des faits imaginaires plutôt que sur des faits réels. Les personnages qui y sont décrits sont dits "personnages fictifs".. Une œuvre de fiction peut être orale ou écrite, du domaine de la littérature,du cinéma, du théâtre ou de la radio.
Source : Wikipedia.
Merci à tous ceux qui ont commenté.
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10/08/2010 à 01:17 |
Je parle pas du tout de ca
enfin j'avais compris que c'était faux mais tu utilisais la 2ere personne, je voulais rester dans le contexte, ensuite je ne critique pas ton imagination mais les quelques defaut de sens que j'ai trouvé dans le texte...
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10/08/2010 à 15:12 |
Tu t'exprimes pas super clairement mais je crois que j'ai compris ce que tu veux dire et je vais tenter de répondre.
On peut très bien foirer une relation, savoir exactement pourquoi on l'a foirée et pourquoi ça vaut quand même mieux que ce soit fini, et puis avoir (irrationnellement, mais quand même) l'espoir que ça marche malgré tout. Ça s'appelle être aveuglé et un peu immature et on peut être conscient qu'on est comme ça et qu'on a tort d'être come ça et tout de même continuer à être comme ça.
Ensuite, à mon sens, le garçon s'intéressait à elle que très superficiellement, du moins c'est comme ça que la narratrice le voit et c'est pour ça qu'elle le quitte.
Ce qui se passe c'est que la narratrice rompt avec le gars, et pense sincèrement que c'est la meilleure chose à faire. Cependant, elle regrette que ça se soit passé comme ça, et elle ne peut pas s'empêcher d'espérer qu'elle a eu tort et que le garçon arrivera à la convaincre qu'elle a eu tort et que tout ira bien à nouveau.
C'plus clair ?
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10/08/2010 à 17:09 |
Je vois, ca se raproche clairement mieux de ce que je pensais du texte ^^
voila, bonne continuation en tout cas