Parfois il est trop tard

Alhambra

Parfois il est trop tard

14

25/03/08 à 22:10

[ ça faisait trop longtemps que je n'avais pas posté, il fallait un texte. ]

L’intimité était énorme, presque intimidante. On était deux, on le sentait à chaque seconde qui nous passait sous le nez. Deux êtres humains animés par leurs intérêts personnels. Deux êtres humains sur le marque-page de leur vie. Ça n’allait pas durer.
Les rayons du soleil qui traversaient les énormes rideaux rouges baignaient la pièce dans une atmosphère sensuelle. Tout jouait à y contribuer. La soie des tissus, la chaleur des couleurs, le bois usé des meubles. Ce léger parfum dans l’air, cette touche d’humidité.
Trois vases entouraient la pièce, et les longues fleurs jaunes qu’ils contenaient contrastaient avec le bordeaux du tapis.
Tu me regardais avec tes yeux bruns, que de nombreux cils épais et longs venaient caresser toutes les deux secondes. Je passais ma main dans mes cheveux emmêlés. Nous nous donnions un semblant de consistance, pour ne pas avoir à dire « et maintenant ? ».
Malgré l’épaisseur des rideaux, le soleil brûlait ma peau, deux ou trois gouttes de sueur perlaient sur mon front. Et il me semblait que tu pouvais entendre mon cœur battre. Mon cœur qui te demandait « et maintenant ? ».
Tout pouvait arriver. Tu pouvais m’embrasser, m’allonger sur les confortables coussins oranges et me laisser là, vibrante de désir mais peut-être satisfaite. Tu pouvais me parler, me laisser entrer en toi et te comprendre tout d’un coup. Tu pouvais me dire « non, je ne veux pas. » Tu pouvais chanter, danser, te lever … Arrêter de me regarder avec ce maudit regard marron qui faisait baisser mes petits yeux noirs ! Tu pouvais attraper une fleur jaune et en déchirer les pétales un à un. Notre avenir, entre tes mains. Tu pouvais me dire « oui, c’est fini, mais ce n’est pas grave. ». Tu pouvais tout faire … Tout. Sauf ça.
Je me souviens de chacun de tes gestes, je peux les associer précisément à une odeur, à un rythme, à un mouvement … Je me souviens, oui. Tu t’es levé, deux larmes lâches sur ta joue timide, tu as attrapé ton pull, posé nonchalamment sur un coussin voisin, tu as cessé de me regarder, et tu m’as dit « bon, tant pis. ».
Il y avait le vent qui entrait par l’entrebâillure de la fenêtre et qui agitait très légèrement le rideau, il y avait la fleur jaune qui penchait dangereusement, l’odeur de l’été qui s’en va, il y avait la sueur, il y avait tous ces souvenirs brûlants, tous ces jours à attendre. A attendre ? Un « bon, tant pis. » ?
Mais c’est ridicule, c’est ridicule … La jeunesse était là, l’envie aussi. La texture, les mots, tout était à notre disposition, les objets tremblants d’espoir.

C’est facile Pierre, c’est facile de regretter cette phrase, dix ans après, de dire « j’ai raté ma vie », et de ne plus être capable de dire « tant pis ». C’est super simple de s’excuser, tellement, tellement facile. Tu regrettes hein ? Tu regrettes cette jeunesse inexprimée, ce baiser abandonné, cette chair refusée. Oh qu’est ce que tu regrettes, je le vois, dans tes yeux qui pleurent aujourd’hui ce qu’ils n’osaient envisager autrefois.
J’ai regretté moi aussi, sur le moment. Abandonnée toute seule entre ces murs déçus qui se moquaient de moi. Ne comprenant pas ce qui t’avait déplu en moi. J’ai regretté de ne pas t’avoir couru après, encore une fois. Mais j’ai tourné la tête, j’ai regardé plus loin, et j’ai vu tout ce qui s’offrait à moi. Tout est devant moi Pierre, l’avenir, le plaisir, la vie. Alors que toi, tu as tout laissé derrière. Dans cette pièce chaude et tentante, dans mon cœur d’autrefois. C’est fini maintenant.

Frosties  

Alhambra  

Parfois il est trop tard

3/14

25/03/2008 à 22:18

Merci beaucoup Uweyv, ça me fait super plaisir

Merci aussi à toi Mallory d'avoir répondu !

Alhambra  

C r a s h y _  

Alhambra  

Parfois il est trop tard

7/14

25/03/2008 à 22:25

Argh, tant pis (merci quand même d'avoir pris le temps de lire et de répondre )

Qu'est ce qui vous a déplu ?

Frosties  

C r a s h y _  

Tutafay