On ne survit pas (nouvelle)

Alhambra

On ne survit pas (nouvelle)

26

11/12/07 à 19:27

C’est moi qui ai abordé le sujet en premier.
Je lui ai dit que s’il voulait m’en parler, je jurais de l’écouter et de croire tout ce qu’il me dirait et que s’il ne voulait pas m’en parler, je jurais de ne pas lui poser de questions.
Il n’a pas voulu m’en parler.
Je n’ai rien demandé, comme promis. Mais au fond de moi, j’étais sûre qu’il irait mieux en en parlant, je savais que cela le soulagerait, que peut-être cela le débarrasserait de tous ces cauchemars qui l’agitaient la nuit, de tous les maux dont il était accablé. Au moins en partie.
Je savais que jamais il ne serait complètement guéri de ce souvenir.
On ne survit pas des camps de concentration sans séquelles.
Il ne m’en a donc jamais parlé. D’ailleurs il parlait peu. Souvent, il s’enfermait dans la salle de bain pendant des heures entières sans faire aucun bruit. Seuls quelques sanglots s’échappaient parfois de la pièce.
J’en étais malade. Je m’étais juré de ne pas lui poser de questions, de ne jamais lui dire de m’en parler et d’un autre côté j’avais l’intime conviction que cela le purgerait et l’aiderait, sans aucun doute.
Je ne reconnaissais plus l’homme que j’avais connu avant les camps. Il y était resté un an. Une année entière où je ne dormais plus la nuit, où je l’imaginais mort et torturé. Ne pas savoir est peut-être pire que savoir. Car quand on ne sait pas, on imagine.
Je n’ai finalement jamais su ce qu’on lui avait fait dans les camps, ce pourquoi il ne parlait plus, ce pourquoi il ne me touchait plus, ce pourquoi il s’enfermait dans une solitude compacte et infranchissable.
La seule chose qui m'était connue était ce numéro, tatoué sur son bras.
Un jour, un frais matin d’hiver où j’avais longtemps marché, je m’étais résolue à lui parler. A insister pour qu’il me raconte tout. Pour qu’il hurle s’il en avait envie, pour qu’il se vide de cette substance qui le pourrissait jour après jour. Pour qu’il me fasse partager un peu ce souvenir, pour qu’enfin il s’allège de ce poids gargantuesque.
Je m’étais répété en tête les phrases que je lui dirais, les gestes que je ferais. J’avais prévu mon sourire, ma douceur. Tout était parfait. Bon dieu, tout était si parfait !
Je suis rentrée à la maison, j’ai dit d’un ton enjoué :
-Coucou !
J’ai posé mes affaires, je me suis concentrée un instant et je l’ai rejoint dans la chambre.
On ne survit pas des camps de concentration sans séquelles.
On ne survit pas des camps de concentration.
Je l’ai trouvé pendu au lustre. Sur la table, un mot était écrit, d’une main maladroite et tremblante :
« Pardonne moi de n’avoir pas su te dire ce qu’on ne peut pas dire. »
On ne survit pas des camps de concentration.
On ne survit pas.

Suave  

Alhambra  

On ne survit pas (nouvelle)

23/26

12/12/2007 à 15:57

Merci tout le monde

Mizato a écrit :
Mais c'est tout à fait correct.
Je crois que tu as un peu mal interpreté mon message...J'ai dit que ton texte me donnait cette impression, pas que c'est ce que tu avais fait

Ok, excuses-moi alors !
(moi, susceptible ? )

Antigone_  

Alhambra  

On ne survit pas (nouvelle)

25/26

12/12/2007 à 18:55

Libre Arbitre a écrit :
Je trouve que le style n'est pas assez recherché, mais le texte est touchant. Bien que la fin ne soit guère originale et très prévisible... ça me donne l'impression que tu as repris une de ces nouvelles que l'on trouve généralement sur des skyblogs peu constructifs, et que tu n'as fait que changer le contexte. Mais c'est plutôt agréable à lire, bravo.

Oh non Oh non, me compare pas aux textes suicidaires qu'on trouve sur les blogs, pitié, tout sauf ça

Antigone_  

On ne survit pas (nouvelle)

26/26

12/12/2007 à 18:58

ZOL_ a écrit :
Oh non Oh non, me compare pas aux textes suicidaires qu'on trouve sur les blogs, pitié, tout sauf ça

Désolééée