Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

Alhambra

Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

13

14/04/08 à 21:28

Un cri. Tout cette histoire se résume en un cri, un hurlement qui déchire le silence, taillade la grande robe lisse du temps, détruit tout sentiment de joie, tout courage, toute envie. Un cri qui anéantit. Pour toujours ...

Suzanne est dans le bois, ce bois sombre et humide où son amoureux lui a donné rendez-vous. Pourquoi ici ? Elle ne le sait pas, ils ne sont jamais venus ici tous les deux. Ce qu’elle sait, c’est qu’ici les branches semblent craquer toutes les secondes, les ailes des oiseaux semblent s’arracher à chacun de leurs contacts avec les branches des arbres, la lune est deux fois plus grosse, la nuit deux fois plus profonde et les arbres deux fois plus hauts. Ce n’est pas rassurant. C’est même terrifiant.
Suzanne regarde sa montre. Il est 21h13 et Alexandre n’est toujours pas là. « C’est vrai qu’il avait une voix bizarre au téléphone … ». Suzanne secoue la tête, ce n’est pas le moment d’avoir des mauvaises pensées, la forêt la met déjà plus mal à l’aise qu’il ne faut.
Suzanne essaie de voir du beau dans ce paysage. Mais décidemment, le banc sur lequel elle est, est bancal, le petit chemin qui passe devant elle s’enfonce dans l’obscurité et les arbres sont tordus. Il n’y a aucune nuance dans les couleurs, tout est noir. Disons kaki. Pour la peintre qu’est Suzanne, c’est frustrant.
« On s’est rencontrés grâce à ça … » A ce souvenir, un sourire se dessine sur le visage déconfit de Suzanne. Elle a rencontré Alexandre parce qu’il est venu lui avouer un jour que de chez lui, il l’a voyait peindre, et que cela le faisait terriblement craquer. Ils étaient tombés amoureux tout de suite, lui semble-t-il. En tout cas, son cœur à elle n’avait fait qu’un tour. Face à cette déclaration timide et fascinée, face à ce joli regard d’un tendre noir, face à ces joues, ce nez, cette épaisse bouche et surtout, face à ce sourire attendrissant.
Il est maintenant 21h19, ce n’est pas normal, Alexandre est presque toujours en avance et le rendez-vous était à 21h00. Suzanne sort son portable et compose le numéro d’Alexandre. Ses doigts le connaissent par cœur. Ils décrivent de mémoire la trajectoire qui relie les touches entre elle. En bouquet final, le pouce appuie sur le petit téléphone vert, et Suzanne imagine la sonnerie qui retentit dans la poche d’Alexandre.
« Allo ?
-Bah Alex ! Tu fais quoi ?
- … C’est qui ? »
Comment ça « c’est qui ? », et pourquoi est-il essoufflé ? Suzanne ne comprend pas.
« Ben … C’est moi, c’est Suzanne, je t’attends !
-Ah oui, pardon … J’a… J’avais pas reconnu ta voix … ça arrive, non ?! Euh, je suis là bientôt, je me dépêche.
-Ah bon …
-Ouais … Pardon. Je suis désolée. »
Suzanne raccroche, dans l’incompréhension totale. Mais elle se dit qu’il a dû s’engueuler avec son colocataire, comme d’habitude, et que c’est pour ça qu’il a cette voix bizarre, qu’il est énervé … De toute façon, ces derniers temps, Alexandre est toujours énervé. Suzanne pense que c’est pour cela qu’il lui a donné rendez-vous ici, pour lui faire une grande surprise, pour qu’ils se réconcilient … Elle pense même qu’il va la demander en mariage, mais elle n’ose pas trop l’imaginer, pour ne pas être déçue. Suzanne est si facilement déçue …
« Mais pas d’Alexandre. Alexandre ne me déçoit jamais. » Se convint-elle.
Les branches craquent derrière elle, le vent a soufflé plus fort pendant un instant. Un frisson parcourt son dos, elle pense à des scènes terrifiantes, elle se demande ce qu’elle ferait, ce qu’elle dirait si quelqu’un passait devant elle à cet instant … Mais personne ne passe. Il vaut mieux penser à Alexandre, son Alexandre.
C’est sûr, il est forcément venu pour s’excuser, surtout par rapport à cette fille, cette Lucie, dont il lui parle souvent, dans le seul but de la rendre jalouse. D’ailleurs Suzanne est sûre qu’il n’y a pas de Lucie, qu’il l’a inventée pour vérifier que Suzanne l’aime comme il l’entend. Ah … S’il savait ! Qu’elle l’aime à la folie, que pour lui, elle se priverait de tout ce qu’elle aime ! Mais ce soir il le saura, ce soir il verra comme elle l’aime ! Ce soir sera leur plus beau soir, Suzanne le sait, tous leurs meilleurs soirs ont mal commencé. Et si celui-ci commence mal, dans le froid et la peur, dans l’obscurité et l’attente, sans doute finira-t-il bien, dans l’amour et la passion.
Suzanne entend quelque chose craquer dans son dos, une autre branche. Le vent lui fait des frayeurs … Pourtant un sentiment étrange monte en Suzanne, ce n’était pas un craquement habituel, c’était le bruit d’un pas sur une branche …
Elle se lève et se retourne d’un seul coup et se retrouve face à Alexandre, le regard au noir bien moins tendre que d’habitude, l’expression du visage bien moins attendrissante, bien moins amoureuse. Mais toujours aussi fascinée.
« Pardonne-moi … »
Même si elle ne comprend pas, Suzanne s’apprête à l’excuser, cela arrive à tout le monde d’arriver en retard. Mais Alexandre sort son bras de son dos et lève au dessus de son visage terrorisé un poignard.
Tout s’accélère dans l’esprit de Suzanne. Le reflet de la lune fait briller la lame. Le poignard s’abaisse vers elle. Alexandre gémit. La pointe s’abat sur la poitrine de Suzanne.
Et Suzanne hurle. Un cri, un cri terrifiant, tranchant, brulant, un cri mortel, qui fait trembler les arbres, qui fait vibrer la lune, qui fait peur aux oiseaux. Le cri semble durer une éternité, il déchire les tympans de toute espèce vivante. C’est un cri si intense, si profond, et en même temps si fragile.
Le corps de Suzanne s’effondre sur le sol et le sang se mélange à la terre.
Alexandre, tétanisé se redresse, essaie d’avancer, titube, trébuche, mais finit par s’éloigner. Sa main tremblante lâche le poignard ensanglanté par terre. Le père de Lucie l’excusera, il en a plein d’autres, des couteaux comme ça.

Chapeau pointu  

Alhambra  

Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

2/13

14/04/2008 à 21:33

Voyage a écrit :
C'est agréable à lire.

Merci !
Et euh ... au niveau de l'histoire, du fond ?

Chapeau pointu  

Alhambra  

Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

4/13

14/04/2008 à 21:44

Argh, ok, merci quand même

Serais-tu la seule à avoir un avis ?

Alhambra  

Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

5/13

14/04/2008 à 22:04

C r a s h y _  

Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

7/13

14/04/2008 à 22:20

Je reste sceptique. Tu gardes toujours un très bon style d'écriture, pour ne pas dire excellent, mais là, même si la forme me plait, le fond me déçoit. Peut-être que j'attendais de ta part un retour dans la partie Création un peu plus "peaufiné", je ne sais pas expliquer.

Il n'en reste pas moins que tu as du talent, même si c'est loin d'être ton meilleur texte.

Am Stram Gram.

Alhambra  

Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

8/13

14/04/2008 à 22:23

Ah, dommage que ça ne vous plaise pas !

C'est vrai qu'en ce moment, j'écris des longues nouvelles, et j'ai moins d'inspirations pour des histoires courtes ...
Argh, espérons que ça me revienne !

Merci de vos réponses !

Uranus  

Et Suzanne attend, à tout jamais (nouvelle)

10/13

14/04/2008 à 22:53

J'me suis dit ''Chouette'' quand j'ai vu un topic de toi dans la partie Créations, mais là j'suis un peu déçue pour le fond de l'histoire . Mais comme dit plus haut, le style est toujours excellent .

Lecureuil  

Tw.