Bon ben suivant l'idée copyrightée par Lady_Yazuka, et aussi à la demande de lakemorgane, je publie le chti début du roman que j'ai écrit. Bon d'office je mettrai pas tout parce qu'il fait 100 pages A4 (eh oui je me suis amusée à l'imprimer, quelle andouille!!!lol)
Bon je vous préviens tout le monde c'est bien déprimant dans l'ensemble c'est une histoire d'ados, rien de surnaturel donc les fans de SF ou de fantasy vous savez à présent que vous perdez votre temps...
PREMIERE PARTIE
Journal de Pierre
C'était comme un rêve. Un cauchemar.
J'étais rentré du collège un vendredi soir, et mes parents étaient assis à la table de la cuisine, face à face. Ils avaient leur tête habituelle, celle qu'ils avaient quand ils avaient passé des heures à crier. J'ai posé mon sac de cours près de l'escalier et j'ai traversé la cuisine. Mon père avait les mains croisées sur la table et regardait le dessous de plat comme s'il lui découvrait soudain un intérêt extraordinaire. Ma mère renifla, puis leva vers moi ses grands yeux rougis. J'ai pris une biscotte dans un placard et je suis allé au salon, sans leur accorder un regard. Comme d'habitude. Le voyage de la cuisine au salon me suffit pour manger ma biscotte.
Je m'assis sur ma chaise et ouvris religieusement mon étui de guitare. Je pris mon chiffon propre et nettoyai avec soin la table, l'éclisse et le manche de ma guitare. Puis je pris mon diapason une fois, une seule, et accordai ma guitare avec soin et méthode, sans me presser. J'entendais mes parents murmurer leur venin dans la cuisine.
- Toujours, toujours, et encore! c'est pas ta faute, c'est jamais ta faute!!!
- Tais-toi, pas devant le petit!
Je serrai les dents. Le petit avait quinze ans, merde!
Ma concentration s'était échappée. J'inspirai et expirai plusieurs fois avant de retrouver mon calme. Je testai chacune de mes cordes, et enfila ma "chaussette" à mon bras droit, pour ne pas abîmer l'éclisse de ma guitare. J'avais fait sonner mes cordes, pour me chauffer les doigts. Toujours comme exercice, je jouai quelques études de Pujol assez compliquées. J'avais l'impression de m'envoler en sentant mes doigts courir sur le manche. Ma main droite sautillait au dessus de la rosace.
Quand j'eus terminé mes exercices d'échauffement, je sortis ma partition, et la dépliai sur mon pupitre. Je pris une grande inspiration, et attaquai ma levée. Sentant chaque note, les faisant vibrer selon leur rôle, organisant la pièce, crescendo pour le suspense, decrescendo pour le mystère ou le calme, ressentant la rondeur de chaque note sous mes doigts, et soudain! point d'orgue... Je suspendis ma mélodie, avant de reprendre de plus belle les notes m'amenant parmi les joyeux fêtards du carnaval de Venise, les danses et les rires de ma partition. Du coin de l’œil je vis que ma mère était accoudée à la porte du salon et me regardait jouer. Ma mère ne m'écoute pas. Elle me regarde. Elle ne m'entend pas. Troublé, je m'emêlai dans mon arpège. Je paniquai en essayant de me rattrapper. Pour limiter les dégâts, je coupai mon son en posant ma main à plat sur les cordes et je tentai de calmer ma respiration. Je n'allais jamais réussir à jouer si je respirais aussi vite!
Comme pour m'enfoncer davantage, ma mère prit une chaise et vint s'asseoir en face de moi. La dernière chose dont j'avais besoin, c'était de son petit sourire triste. Je serrai les dents, et posai mon front contre ma guitare pour me calmer et l'effacer de mon champ de vision.
"S'il te plaît. Va-t-en. Laisse-moi seul."
Mais ma mère n'était pas télépathe. Je n'espérais plus qu'une chose, qu'elle me laisse me concentrer sur mon carnaval vénitien.
- Pierre...
Oh non. Pitié. Laisse-moi.
Elle posa sa main douce et fraîche sur mon bras.
- Pierre. Regarde-moi.
A contrecœur, je relevai la tête. Elle avait séché ses larmes, mais elle avait encore les yeux rouges.
- Tu es très bien. Ta position est irréprochable. Arrête de te cramponner à ta guitare...
Ma position ! Rien sur mon jeu. Elle ne m'avait pas entendu.
Elle prit une grande inspiration.
- Pierre, ton père et moi avons pris une décision.
- Encore?
Elle soupira. Cela me mit hors de moi.
- Ne joue pas la martyre de la nation, t'espères quoi? la canonisation?
Ses yeux s'humidifièrent. J’allais avoir droit à l’habituelle crise de larmes pour me faire sentir que j’étais un fils ingrat.
- Vas-y, pleure. Pour changer!
Les larmes coulèrent sur ses joues. Comme d'habitude.
- Ton père et moi avons décidé de partir en week-end. Tous les trois.
Qu'est-ce que c'était encore que cette idée?
- Et moi j'ai cours lundi à huit heures.
- Oh, arrête de poser le collège à chaque fois que tu ne veux pas faire quelque chose!!! en temps normal tu t'en fiches pas mal!
C'était vrai.
- Et y'a quoi au programme? Arsenic et ciguë dans le menu, grandes falaises pour vous pousser dans le vide?
Elle soupira.
- Pierre... Ne fais pas preuve de mauvaise foi s'il te plaît. Toutes les familles partent en week-end!
- Ouais, mais...
- S'il te plaît Pierre. Ne dis pas"ouais", dis "oui".
- Non.
Deux nouvelles larmes creusèrent de nouveaux sillons sur ses joues. Sans doute pour essayer de m’attendrir.
- Nous partons simplement en week-end à la montagne, pour prendre l'air! se mit-elle à geindre.
J'avais la haine. Pourquoi détournait-elle la conversation ? Pourquoi restait-elle sur des sujets superficiels ? Pourquoi refuser de m’entendre parler du problème de fond ?
- Mais pourquoi est-ce que vous vous acharnez à faire semblant de rien? divorcez, tout le monde y trouvera son compte!
Ma mère s'arrêta soudain de pleurer, abasourdie, puis son usine lacrymale reprit son activité de plus belle comme si j'avais dit la pire horreur possible.
- Maintenant laisse-moi. Je travaille sur le carnaval de Venise, c'est très compliqué.
Et elle partit pleurer plus loin.
Je fis le vide dans mon esprit, et mes doigts effleurèrent mes cordes...
[dsl si c si long mais ça met du tps à démarrer en fait là c comme 1 prélude...]
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trop génial
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Bon, la suite, un peu longue...
Mais elle ne renonça pas. Au dîner, mon père me demanda:
- Tu as fait ta valise?
- Quoi?
- On dit pardon!
- Je m'en fous.
- Tu as fait ta valise?
- Non. Quelle valise?
- Au cas où tu l'aurais oublié, nous partons tous les trois à la montagne demain matin!
- Amusez-vous bien à verser de l'arsenic dans votre thé, j'ai cinq pièces de Tarréga à déchiffrer.
Je pris une nouvelle bouchée de courgettes, pour bien leur faire savoir que je n'avais pas l'intention de changer d'avis. Le dîner continua normalement, dans le silence le plus total. A la fin, je les laissai débarrasser la table et j'allai retrouver ma guitare. Mais on sonna à la porte. Ce fut mon père qui alla ouvrir.
- Rachid! Comment vas-tu?
- Bien msieur. Est-ce que Pierre est là?
- Oui, je te l'appelle. Ce week-end il ne pourra pas venir te voir, nous partons à la montagne.
Rachid, en voyant ma tête, se douta tout de suite que ce n'était pas tout à fait ça...
- Allez viens dehors, j'étouffe dans cette taule.
Je le tirai avec moi hors de l'immeuble. Mes mains dans ma veste, la tête enfoncée dans mon col pour ne pas trop sentir le froid, je marchais vite. Rachid me suivait, habitué à mon état taciturne.
- Alors comme ça, tu pars à la montagne?
- Y paraît.
- Ah.
Nous fîmes encore quelques pas avant d'atteindre les bancs d'un jardin public. Je m'assis. Rachid voulut me suivre, mais se releva aussitôt.
- Hé! Il gèle le cul ton banc!
- Ben reste debout alors, si ça te fait plaisir...
Il sautillait d'un pied sur l'autre, puis finalement, il tira un peu sa parka grise et s'assit à côté de moi. Une buée s'échappait de nos bouches.
- T'as pas la forme, hein?
- Non.
- Qu'est-ce que t'as?
- J'ai du mal à enchaîner les trilles démanchées avec les barrés sur un morceau.
Il plissa les yeux.
- Trilles démanchées barrées... Ca me dit quelque chose... Alors attends, les trilles c'est les notes qui vont vite, les démanchés quand tu monte ou que tu descends ton bras sur ton manche, et les barrés quand tu mets tout ton doigt sur les six cases de ta guitare?
- C'est presque ça, ouais…
Mais il se doutait bien que je n’avais strictement aucun problème musical. J’excellais en musique. Il me regarda comme seul un ami peut le faire.
- T'as encore des problèmes avec tes vieux?
- Ouais.
Lui, Rachid, n'avait pas de problème. Son père était rarement là, et sa mère ne s'occupait presque que de lui, le petit dernier d'une famille de cinq enfants, tous partis de la maison sauf lui. Elle lui cuisinait toutes sortes de pâtisseries délicieuses avec beaucoup de miel, et parfois quand je venais chez lui pour le goûter, il y en avait. Les gâteaux de la mère de Rachid étaient les meilleurs de la Terre, et lui-même, il s'en vantait beaucoup, alors que n'importe quel garçon de notre âge évitait de parler de ses parents pour autre chose que pour les calomnier. J'aimais beaucoup la mère de Rachid, avec ses grandes robes à fleurs desquelles elle débordait un peu, et avec son petit accent exotique et doux, son sourire bienveillant et ses yeux qui couvaient son fils du regard comme s'il était la première merveille du monde. Intérieurement je crois que je jalousais un peu Rachid d'avoir une mère aussi chouette.
Mes parents ressemblaient à des mannequins, plats et lisses, rabâchant toujours le même discours sur la politesse et les bonnes manières, toujours à essayer de ressembler à tout le monde. Mon père, cadre sérieux avec attaché case intégré, ma mère, femme sophistiquée en tailleur élégant qui ne savait cuisiner que des surgelés. Ils ne s’occupaient de moi que pour me rappeler les bonnes manières et exhiber leur fils si bien élevé devant leurs nombreuses connaissances construites exactement sur le même modèle. Tout ce que je pouvais leur dire leur glissait dessus comme de l'eau sur une vitre, mis à part les grossièretés. C'était donc devenu presque mon seul moyen d'expression.
- Dommage que tu ne restes pas. Mon frère Abdel rentre demain, on aurait pu lui demander de nous faire essayer sa nouvelle mob.
- Ouais, dommage. T'en fais pas que je vais faire la tronche pendant tout le week-end.
- Et l'interro de SVT? tu vas réviser?
- Non. Rien à foutre de la SVT.
- Comme tu veux. Mais moi je dis que tu devrais un peu lâcher ta guitare. Il y a d'autres choses dans la vie, regarde!
Il désigna du menton deux filles qui passaient, plastiques. Une blonde et une brune. Il les siffla, et elles gloussèrent.
Je posai ma main sur son bras.
- Rachid, ça m'intéresse pas.
Il me regarda.
- Tu sais Pierre... J'ai jamais réussi à comprendre comment tu fonctionnais. Et je crois que je comprendrai jamais.
Je regardai ma ligne d'horizon d'un air passif. Celui que prenaient mes parents quand je leur parlais. Mais Rachid me donna une grande tape dans le dos.
- Allez, c'est bien pour ça que t'es mon meilleur pote!
J'eus un petit sourire. J'avais comme l'impression de ne pas mériter l'amitié de Rachid. Un mec comme lui devait avoir d'autres choses à faire que de traîner avec un dépressif comme moi! Mais à chaque fois que je lui posais la question, il m'ébouriffait les cheveux en me disant "T'es unique, mec." Cela ne servait donc à rien de lui poser la question une nouvelle fois.
Un petit rouge-gorge voleta devant nous. Il était en avance sur la saison. J'aimais bien ces petites bêtes, toutes mignonnes et fragiles.
Finalement, nous discutâmes de tout et de rien, du collège, de grandes questions qui nous agitaient, de filles, de livres, de films.
Et puis dans notre classe, nous étions tous les deux à avoir redoublé. Rachid n’était pas à franchement parler un mauvais élève, mais disons qu’il avait « oublié » d’assister à beaucoup de cours, et aux conseils de classe, il avait été décrété à l’unanimité qu’il devait refaire une troisième. Quant à moi, j’avais refusé tout net d’ouvrir quel cahier que ce soit, à part le classeur de musique. Nous avions donc redoublé ensemble, et pourtant, notre collège était le meilleur de tout le secteur…
Au bout d'un moment, en entendant la pétarade d'une moto, je regardai l'heure. Il était presque neuf heures, et des parents normaux se seraient inquiétés. Nous rentrâmes donc, traînant le plus possible pourtant, je n'avais pas envie de rentrer chez moi.
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24/07/2005 à 11:51 |
haaa, c'est génial ! LA SUITE, LA SUITE !!!
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24/07/2005 à 11:55 |
trop coollllllllllllllllllllllllllllllll
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24/07/2005 à 11:59 |
Bon, ben pour le plaisir de mes deux lectrices, je poste la suite... Très court, cet épisode, c'est Pierre qui rentre chez lui...
Nous nous quittâmes devant ma porte, d'une poignée de main amicale. Avec un clin d’œil, Rachid me souhaita bonne chance pour mon week-end. Je pénétrai dans l'appartement. Pas un bruit, mais les lumières étaient allumées. Je claquai violemment la porte d'entrée, pour leur faire savoir que j'étais là. Rien.
J'allai au salon. Mon père était dans le fauteuil à bascule, et ma mère sur le canapé, chacun à un bout de la pièce. Il régnait un silence pesant.
Pas de questions. Il était neuf heures et demie, il faisait nuit, la capitale grouillait de gens pas fréquentables. Mais pas une seule question, pas un mot, pas un regard. Je levai ma main de la poignée, et remarquai que mes doigts tremblaient. Je tentai de faire le vide dans ma tête, je n'y arrivai pas. Au-dessus, j'entendis que Rachid venait de rentrer, sa mère n’arrêtait pas de lui parler et son père de plaisanter avec lui. Je marchai le long du buffet pour aller allumer la télé. Je m'arrêtai pour enlever un peu de poussière du vase préféré de ma mère.
- Attention à mon vase s'il te plaît, il est fragile.
Je n'en crus pas mes oreilles. N'importe quel parent normal se serait inquiété que son fils de quinze ans revienne à vingt et une heures trente sans l'avoir prévenu, et pour qui étaient les pensées de ma mère quand je revenais? Pour son vase!!!!
Ulcéré, je pris le vase à deux mains et le jetai par terre. Il éclata en mille morceaux dans un fracas qui fit sursauter mon père.
- Vous méritez que de crever!!!!!!!!!!!!!!ais-je hurlé.
Ils ne bougèrent pas d'un centimètre. Je courus dans ma chambre, loin d'eux. Au pied de mon lit m'attendait ma valise, déjà faite, fermée.
Je me cognai la tête contre le mur jusqu'à ce que la douleur me fasse chanceler. Puis je m'effondrai sur mon lit et sombrai dans le néant.
Vers minuit, je me levai pour aller boire un verre d'eau. Le salon avait été nettoyé, et il ne restait aucune trace des débris de verre. Sur tout l'appartement régnait un lourd silence seulement ponctué par des bruits de voitures ou des conversations dans la rue.
Je retournai dans ma chambre, la gorge nouée, et me retournai dans mon lit jusqu'au lendemain.
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24/07/2005 à 12:00 |
trop géniallllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllll
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24/07/2005 à 12:04 |
Bon, la suite, en 3x plus long, mais là c'est le drame!!!
Le petit déjeuner se déroula dans un silence total, si on exceptait le bruit des cuillères dans les bols de café. Je me suis souvent demandé si mon oreille extraordinaire dont me félicitait souvent mon prof de guitare ne me venait pas de ce silence omniprésent. Après avoir mangé une tartine et demie, et donné le reste au chat du voisin qui se promenait sur le balcon, j'allai au salon. Je sortis ma guitare, l'accordai toujours selon le même rituel, puis fis sonner mes cordes une à une en posant mon front sur l'éclisse pour bien ressentir les vibrations. Extérieurement, cela pouvait sembler étrange, voire ridicule, mais j'en avais besoin pour me sentir en osmose avec ma guitare. Quand je me sentis prêt, je commençai quelques études pour me chauffer les doigts, en savourant bien chaque note. A chaque fois que je prenais ma guitare, je ne sentais plus rien d'autre que les notes, j'étais ma guitare. Soudain, juste entre deux démanchés barrés avec extension du mi au si grave, la porte d'entrée claqua bruyamment. Je sursautai. Le charme était rompu, mon père descendait les valises dans le coffre de la voiture.
- Pierre, dépêche-toi!!!
Je rangeai ma guitare avec regret. J'avais un sourd pressentiment. Comme si c'était la dernière fois. Mais c'était stupide. Ma guitare c'était moi. Et quoi qu'il arrive, je continuerais à en jouer. Rassuré, je fermai l'étui avec soin. Si j'avais su!!!
Ma valise était chargée. Je savais environ ce qu'elle contenait: des vêtements pour deux, voire trois jours. Peut-être une lampe de poche. De toute façon, je n'avais pas d'objet fétiche à emporter partout avec moi, comme un gri-gri ou un souvenir de vacances auquel je tiendrais. Mon seul objet c'était moi; c'était ma guitare, dont je jouerais jusqu'à la fin de ma vie. Et le jour où les rhumatismes auraient raison de mes doigts, je me suiciderais en me jetant de la Tour Eiffel avec ma guitare. De toute façon, cela ne ferait de peine à personne puisqu'il n'y aurait personne dans ma vie à part ma guitare. Rachid se marierait et aurait plein de beaux enfants, mais je finirais célibataire et solitaire. Cela ne me dérangeait pas. C'était comme ça que je voyais les choses.
Je m'assis dans la voiture, avec un bon roman, et je mâchais mon chewing-gum en essayant de ne pas penser à mes parents juste devant moi. Ma mère se retourna, elle portait d'énormes lunettes de soleil. Des lunettes de soleil en plein Paris. Début novembre. C'était tout à fait ma mère, ça.
- Pierre, bichou, tu pourrais arrêter de mâcher ce chewing-gum s'il te plaît? ça fait très mal élevé, on dirait un ruminant! S’écria-t-elle en relevant ses lunettes dans un geste digne d’une vedette de cinéma.
- Je rumine de sombres pensées de meurtre pour certaines personnes qui m'empêchent de travailler... Et je m'appelle pas bichou.
Elle resta silencieuse un petit moment.
- Et arrête de lire. Avant même qu'on ait démarré tu me donnes mal au cœur...
Je continuai stoïquement ma lecture, même si je lisais un mot par ligne. Elle allait me lâcher les baskets, oui?
Elle sortit pour voir si mon "incapable de père ", je cite, arrivait à ranger les valises dans le coffre. J'entendis un bruit de dispute, puis mes parents fermèrent le coffre brutalement, rentrèrent dans la voiture s'asseoir sur leur siège et claquèrent chacun leur portière. Quel bon début! tout le week-end à cette sauce-là, ça allait être mythique!
Environ dix heures de trajet s'écoulèrent ainsi. Mon père avait pensé à prendre son vieux baladeur à cassettes, et j'avais quelques cassettes de guitare que j'avais moi-même enregistrées. Bien sûr, je connaissais chaque note par cœur.
A la fin, même, vers sept heures, j'avais reposé ma tête contre la vitre, sentant les vibrations de la route se propager dans mon crâne, et j'avais fermé les paupières, dans un demi-sommeil.
La voiture s'arrêta, et cela me réveilla complètement. Du coin de l’œil, je vis mes parents sortir de la voiture, et ma cassette s'arrêta. J'entendis quelques bribes de conversation.
- Tu crois qu'il dort [inaudible]
- [inaudible]-être...toute façon... cassette... 'tend pas.
Long silence.
- ...prêt?
Long silence.
- ... faut bien................portable?
- 'Vaut mieux.
- ...... lettre?
- Non.
Mais de quoi parlaient-ils? Mon père ouvrit une portière, et je sentis un petit objet atterrir sur mes genoux. J'entrouvris prudemment les yeux: son téléphone portable. J'entendis mes parents s'éloigner sur un sentier. J'entendais les cailloux crisser sous leurs pas. Le bruit s'éloignait, se faisait de plus en plus lointain. Finalement, je me risquai à regarder. Nous étions arrêtés sur un bord de route montagneux, à une altitude assez élevée, si on en croyait la brutalité de l'air et les rochers environnants. Mes parents étaient loin. D'un coup, ils disparurent à l'angle d'un rocher. J'eus un mauvais pressentiment... C'était tout à fait stupide, tout ce qui pouvait leur arriver de pire c'était de se disputer, et franchement, ils faisaient ça à chaque fois qu'ils se voyaient. Quelle famille joyeuse! De toute façon, à part eux, je n'avais aucune famille. Mes grands-parents maternels étaient morts le funeste 11 septembre 2001, pendant qu'ils se promenaient à côté des tours jumelles. Mon grand-père paternel avait perdu la tête avec l'âge, et s'est un jour jeté du balcon. En l'apprenant, ma grand-mère avait fait un infarctus du myocarde. Quelle joyeuse famille. Mes parents étaient enfants uniques. Je n'espérais qu'une chose: ne pas finir comme eux. Le mariage ne pouvait aboutir qu'à un échec total, c'est-à-dire, un sur trois qui finit en divorce, et sur les deux qui survivent, un où les époux passent leur temps à se prendre la tête. Non merci, très peu pour moi !
Cela faisait plusieurs minutes qu'ils avaient disparu au tournant. Je commençais à m'inquiéter. En pure perte, car il ne pouvait rien leur arriver. Bien sûr. Ils reviendraient d'ici quelques minutes, mon père reprendrait le volant parce que la voiture c'est pour les hommes, ma mère le contredirait et tout continuerait sur l'habituel bruit de dispute.
Je sortis de la voiture. Une stupide envie de se rassurer. J'allais aller au bout, les voir au loin, et rappliquer en vitesse avant qu'ils voient que j'étais réveillé.
Je remontai le petit sentier après avoir fermé la voiture. Mon père avait laissé les clefs sur son siège, je les pris avec moi, ainsi que le portable et mes cassettes. Comme pour m'encourager.
Je tournai après le rocher où je les avais vus disparaître. Je ne les vis plus. J'avançais quelques centaines de mètres, au bord de la falaise. La vue était magnifique. Mais je me forçais à continuer. Mon stupide pressentiment s'accentuait. Je paniquais presque. Soudain, je n'y tins plus. Je grimpai sur un rocher qui surplombait le plateau. Je vis les deux silhouettes de mes parents devant le vide. Ils admiraient la vue. Oui, la vue. Qu'elle était jolie la vue...! Intérieurement, j'eus un ricanement nerveux. Mes doigts tremblaient. Stupide. Allez Pierre, retourna à la voiture et termine ta sieste. Laisse-les se balader, pour une fois qu'ils ne se disputent pas...
Mais ce fut plus fort que moi, je m'approchai. Par la suite, je ne sus dire si j'eus mieux fait de rebrousser chemin ou de rester. Quand je ne fus plus qu'à dix mètres derrière eux, je les vis se prendre la main. Ils tournèrent la tête et se regardèrent dans les yeux. Puis ils regardèrent le vide qui s'étendait devant eux, le gigantesque gouffre qui menaçait de les aspirer à tout moment. Et soudain je compris. Tout se passa en un dixième de seconde. Leurs mains se serrèrent, et je voulus crier pour les en empêcher. Mais que dire? un instant, m'effleurèrent l'esprit: "papa" et "maman". Mais j'eus soudain l'impression que ces mots étaient incongrus. Je ne me souvenais pas les avoir prononcés. Je me précipitai tout de même, mais ils s'étaient déjà lancés. Je criai.
- BORDEEEEL!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Je n'avais rien trouvé d'autre. Ma mère tourna la tête, et j’eus le temps de voir, l’espace d’une demi-seconde, son expression surprise, mais malgré tout scandalisée d’entendre une telle horreur. La dernière chose que j'entendis fut son cri :
- Sois poli! poli! poli, poli, poli.... li....li... i....
L'écho se propagea dans mon crâne. Je fermai les yeux. Quand je les rouvris, il n'y avait plus rien devant mes yeux. Je ne voulais pas regarder en bas. Je ne pouvais pas.
Je hurlai. Je me mis à courir vers la voiture. J'étais perdu. Qu'est-ce que j'allais faire? Sur le siège, comme par coïncidence, il y avait une carte, où était entourée une falaise abrupte, et à côté, un numéro de téléphone. La police. Quel idiot je faisais. Ce n'était pas une coïncidence, c'était un fait exprès. Ma main heurta le portable dans ma poche. Mes doigts tremblaient. Je composai le numéro avec difficulté. On décrocha au bout de quelques sonneries.
- Allô?
C'était la voix d'un policier fatigué par sa journée. Il ne devait souhaiter qu'une chose: rentrer chez lui.
- Allô, heu, je... je...
- Qu'est-ce que tu as petit?
- Je... C'est mes parents...
- Qu'est-ce qu'ils ont tes parents? J'ai pas tout mon temps, moi! tu te dépêches?
- Ils ont sauté... de la falaise!
Il y eut un silence.
- Tu te moques de moi.
- NON!
- Dans ce cas, donne-moi le nom de la falaise.
Je baissai les yeux vers la carte.
- La falaise de sainte Claire...
- Bon sang! ne bouge surtout pas gamin, on arrive!
Il raccrocha.
Je remis le portable dans ma poche. Je ne savais plus quoi faire. Je retournai au bord de la falaise. Un peu plus loin que l'endroit où ils avaient sauté. Juste en dessous de moi il y avait une petite plate-forme, à une vingtaine de mètres. Je scrutai le fond du ravin avec terreur et appréhension. Je ne voyais rien, c'était tellement profond... Soudain, ma chaussure dérapa. Je glissai. En hurlant, j'essayai de me rattraper au bord, mais j'étais déjà trop loin. Je volais. Et bientôt j'allais m'écraser en bas. Soudain, je sentis un choc violent propager une douleur inouïe dans tout mon bras gauche. Il n'était pas un peu tôt? Ah si. La plate-forme... Ma tête cogna une pierre, et je sombrai dans le néant, oubliant la douleur qui tenaillait mon bras gauche. Le droit, je ne le sentais pas.
C'était comme un rêve. Un cauchemar.
Livre (2) |
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24/07/2005 à 12:13 |
wouav, quelle chute... la suite !
Livre (2) |
10/29 |
24/07/2005 à 12:17 |
Allez, je poste la fin du prélude... et après si personne ne poste eh ben tant pis!
lakemorgane---> je t'enverrai la suite en MP
J'ai le vague souvenirs de flashs, soit d'images, soit de sons, soit de couleurs. Je me souviens avoir entendu des cris. Puis une douleur intense dans mon bras gauche. Ensuite, un plafond immaculé, et une femme habillée de vert pâle penchée sur moi. Après, tout n'était qu'un gros blanc.
Puis j'ai fini par ouvrir les yeux. Et les garder ouverts. Je ne me souvenais presque plus de rien.
Une infirmière se pencha sur moi.
- Ca va petit?
Je gémis "ma guitare", assez stupide en soi, de l'extérieur, quand on sait que mes parents s'étaient jetés de la falaise sous mes yeux. Mais ma guitare était ma vie, et si je devais la perdre j'irais moi aussi au fond du ravin tuer mon chagrin.
- Qu'est-ce que tu dis?
- Ma guitare...
- Est-ce que tu te sens bien?
- J'ai mal...
En effet, une douleur intolérable me tenait le bras gauche.
- C'est normal. Ca va passer.
La douleur allait passer, et je pourrais bientôt jouer de la guitare. Si on comptait maximum une semaine pour laisser mon bras se reposer, dans une semaine j'allais reprendre la guitare, en mettant les bouchées doubles. Oui, j'allais faire comme ça.
Un homme entra dans la chambre. C'était un policier en uniforme.
- Bonjour. On m'a dit que tu étais réveillé.
Je demandai assez inintelligiblement qui il était. Il se présenta, me montra sa carte, et fit signe à l'infirmière de sortir après s'être assis.
- Bien, maintenant que nous sommes tranquilles, nous allons pouvoir discuter. C'est moi qui ai répondu au téléphone, quand tu as appelé au commissariat.
Il n'y avait aucune question. Je ne répondis rien.
- Nous avons retrouvé des papiers d'identité dans la voiture. Ceux de tes parents, et les tiens. Nous, la brigade de police, avons besoin de savoir ce qui s'est passé exactement. Si bien sûr tu te sens prêt à en parler?
Je réfléchis. Que me demandait-il? Ce qui s'était passé... Passé... Passé quoi? Voiture, police, parents... le week-end à la montagne... montagne... falaise! je me souvenais.
- Oui.
- Tu ne veux pas en parler?
- Si. Je peux.
- Que s'est-il passé?
- Ils ont sauté.
- Tu es certain? Ils ne sont pas simplement tombés par accident ?
- Ils se tenaient la main. Et puis ils ont sauté, répondis-je, impassible.
Le policier fronça les sourcils. Qu'importe, il pouvait toujours s'imaginer que c'était le choc qui me rendait aussi froid.
- Mais avant?
- On était partis en week-end. Ils croyaient que je dormais. Ils m'ont laissé dans la voiture avec le portable, la carte, et un numéro, en croyant que je dormais. Ils sont partis et je les ai suivis. Je suis arrivé, ils étaient devant le vide. Et puis ils ont sauté. Après, j'ai téléphoné, et je suis retourné au bord pour voir, j'ai trébuché et je suis tombé. C'est tout.
Il n'avait pas besoin de savoir qu'entre-temps mes parents se crêpaient le chignon.
- Tu penses que c'est un suicide?
- Ca en a plutôt l'air, non? C'est vous le flic ou c'est moi? merde!
Soudain, un cri résonna dans ma tête. "Sois poli!" Je me laissai retomber sur mon oreiller. Epuisé.
- Bien, tu as l'air fatigué, euh, Pierre. Je vais te laisser te reposer.
- Attendez!
- Oui? dit-il en s'arrêtant sur le seuil de la porte.
- Quand est-ce que je pourrai jouer de la guitare? Quand est-ce que mon bras sera guéri?
Il toussa nerveusement, puis dit, un peu mal à l'aise:
- Je vais demander à un médecin de venir te le dire. Je ne le sais pas... Au revoir, et bon rétablissement...
Il sortit. Un médecin allait venir, pour me dire que je pourrais reprendre ma guitare d'ici une semaine, voire même quelques jours...
Un long quart d'heure plus tard, la porte s'ouvrit sur un médecin.
- Bonjour jeune homme.
- Bonjour. Vous êtes un docteur?
- Oui. Je me suis occupé de toi pendant que tu étais dans le coma.
Le coma! rien que ça!
- Merci... Docteur, quand est-ce que je pourrai jouer de la guitare?
- Jouer de la guitare?
- Je joue de la guitare classique à très haut niveau. Je dis m'entraîner beaucoup tous les jours, et dans un an, j'ai un concours très important à passer. Quand est-ce que je pourrai reprendre ma guitare?
Il baissa les yeux.
- Personne ne t'a rien dit?
- Non. Je dois avoir juste une petit douleur bénigne dans le bras gauche, n'est-ce pas?
Il se rapprocha, et s'assit sur le bord du lit.
- Pierre... Je vais te dire la vérité. Ton bras gauche... Il est cassé. Nous te l'avons plâtré, et il faudra au moins deux mois pour que les os se ressoudent.
Je regardai alors pour la première fois mon bras gauche. Il était plâtré de l'épaule au poignet. Je me laissai retomber sur mon oreiller. Anéanti. Deux mois sans travailler ma guitare? Cela équivalait à perdre au moins trois ans d'études intensives!
- Mais il me reste mon bras droit...
Je tentai de le sortir des draps. J'avais beau me forcer, je ne le sentais pas. Il ne m'obéissait pas. Je regardai le médecin, perdu, ne voulant pas prendre le risque de comprendre. J'essayai à nouveau de bouger mon bras. Mes doigts. Rien. Pas même l'illusion d'un frémissement. Le médecin toussa.
- Pierre, ne te fatigue pas inutilement.
- Mais... Mon bras! il ne bouge pas!
- C'est tout à fait normal.
Je me détendis.
- Alors, je pourrai le bouger dans quelques heures, n'est-ce pas?
Il soupira.
- Pierre, ce genre de choses n'est pas facile à annoncer... Je dois t'avouer que nous craignions un tel problème.
- Mais quel problème? QUEL PROBLEME???
J'étais on ne peut plus angoissé. J'avais crié.
Le médecin me regarda.
- Pierre... Ton bras droit est paralysé. Dans ta chute, ton crâne a du heurter une pierre. La zone de ton cortex qui correspond à ton bras droit a du être touchée.
- Mais c'est provisoire, n'est-ce pas? C'est provisoire!!!
Son regard était fuyant.
- Personne ne peut le dire. Très peu de gens ont retrouvé l'usage d'un membre paralysé... Cela dit, tu aurais pu être entièrement paralysé.
- Mais si vous saviez comme je m'en fiche, moi, d'être totalement paralysé! J'aurais mille fois préféré!!! Ce que je veux, c'est mon bras! mon bras vous m'entendez? Pour pouvoir jouer! Parce que ma guitare c'est toute ma vie!!!
En sueur, je m'écroulai sur mes oreillers. C'était impossible. Ce cauchemar allait cesser, et je me réveillerais chez moi, je me lèverais de mon lit mes deux bras intacts, et j'irais travailler mes pièces. Pour rester le petit virtuose d'Alberto mon prof de guitare. Ca allait se terminer.
Le médecin parla.
- L'équipe de sauvetage a récupéré tes parents au fond du ravin. En principe ils n'auraient pas du survivre à une chute pareille, et ta mère est morte pendant le transport. Ton père était dans le coma, mais malheureusement...
- Je m'en fiche.
Il s'interrompit.
- Pardon?
- J'ai dit: je m'en fiche. Je n'en ai rien à faire! tout ce qui m'intéresse c'est ma guitare, vous comprenez??? Eux ils sont morts! MORTS! Et ma guitare, elle, elle vit, elle! mais si je ne peux plus en jouer, c'est moi qui suis mort! Parce que sans elle je ne suis plus rien!!! RIEN!
- Doucement, ne t'énerve pas, ton état est encore stationnaire...
- Justement! JUSTEMENT! tant mieux! si c'est comme ça je vais m'énerver! pourquoi vous m'avez sorti du coma? POURQUOI? Si je ne peux plus jouer, ça sert à quoi que je vive? si je pouvais bouger, je me jetterais par la fenêtre!!!
- Tu ne sais pas ce que tu dis. Je vais te donner un calmant, et tu vas dormir. En te réveillant tu te sentiras mieux.
- Non! Je sais ce que je dis et je ne me sentirai pas mieux! je ne me sentirai jamais mieux!!!
Mais je sentis une aiguille me transpercer la peau. Malgré ma lutte, je sombrai dans le néant.
[voilà, fin du début...mdr maintenant j'arrête!!!]
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24/07/2005 à 12:38 |
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trop bien ton livre
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24/07/2005 à 20:49 |
hey j'adore ton histoire^^la suite ^^!!!!
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C'est super^^^^^^^^
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c génialllllllllllllll
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25/07/2005 à 12:57 |